samedi 25 octobre 2014

Erzsébet Bathory, la comtesse sanglante

(Filez, ce n'est pas un jardin d'enfants ici! Je déconseille la lecture aux âmes sensibles!)


Pas de femme serial -killer jusqu'à Aileen Wuornos? ( 1956-2002, ayant tué sept hommes qui l’auraient prise en stop) 



Cette rumeur persistante est hélas fausse comme le prouve par exemple l'existence de Belle Gunness (1859 -1908, a tué sa famille et des ouvriers de son exploitation puis ses prétendants façon Landru) 




ou Delphine Lalaurie (1775– 1842, torturait et tuait ses esclaves) .



 En fait, Erzsébet Bathory  (1560-1614) a le plus grand nombre de victimes (600) attribuées  à une femme.



Comtesse en Hongrie d'alors, (aujourd'hui Slovaquie), elle fut mariée à Ferenc Nádasdy qui périt sur un champ de bataille en 1604. Erzsébet restée seule entreprit de diriger la région à sa façon depuis son château de Csejte et laissa libre cours à de coupables penchants.





Une servante aurait un jour tiré les cheveux d' Erzsébet Báthory un peu trop fort en la coiffant. Cette dernière l'aurait giflée à la faire saigner du nez. Éclaboussée par quelques gouttes d'hémoglobine, Erzsébet aurait remarqué qu' à cet emplacement sa peau avait gagné en souplesse. Elle fit tuer puis saigner sa domestique et se baigna dans le sang. Mais l'amélioration qui en résulta fut provisoire et elle dut recommencer, dit-on.

La jeunesse et la beauté l'obsédaient et le plus incroyable dans tout ça c'est qu'Erzsébet  avait (peut-être)  raison!  Le "masque au sang",  appliqué sur les cellules du visage selon un traitement à la mode en Floride actuellement, accélérerait bel et bien leur rajeunissement. Aujourd’hui toutefois c'est la propre hémoglobine du client (prélevée sur son bras)  que l'on applique ensuite sur son visage. (à moins d'user, pour tout le corps, de sang animal) La comtesse, elle, ne se contenta pas de son seul visage et ne décida pas non plus de se mutiler pour obtenir le sang-qu'elle en aie ou non eu l'idée après l'incident avec la bonne.  




Quel qu'aie été l'élément déclencheur de tout ceci, Erzsébet Báthory recruta des jeunes filles des environs (de préférence vierges) prétendument pour les engager comme domestiques. En réalité les malheureuses passaient rarement la nuit. (à moins qu’Erzsébet n’attende qu’elles aient commis une faute-peu grave-pour les « punir ».)

On rapporte des tortures faites à coup d’aiguilles, ou des victimes laissées à mourir de froid dans la neige. Voire dans des lacs gelés comme cette infortunée sur qui Erzsébet aurait fait verser de l’eau glacée pour la voir périr lentement.





On ne connaîtra pas avec exactitude tout ce qu’Erzsébet a accompli comme atrocités mais les histoires sont légion. La plus connue concerne les bains réguliers de sang de pucelles, ou l’utilisation de « vierges de fer » pour le recueillir. 




Ces sarcophages de fer hérissés de clous (on en voit notamment dans le film Sleepy Hollow) 

La mère d'Ichabod Crane dans la vierge de fer.

en tant que moyen d’exécution légal relèveraient du mythe. Rien ne garantit, hélas, qu’en revanche des instrument de style voisin n’aient été fabriqués pour un usage privé…

On raconte qu’ Erzsébet fit venir des filles pauvres pour un banquet (à l’occasion de la Noël ou du Nouvel an) et qu’une fois assises, les lumières s’éteignirent. Quand on ralluma, les infortunées avaient toutes la gorge tranchée, et la comtesse apprécia bien plus les mets arrosés de leur sang.


Photo de Celeste Canino


Erzsébet Báthory aurait également souffert de migraines chroniques ; à ce qu’on dit la seule chose qui les soulageait étaient les chansons d’une cantatrice itinérante. Elle put, tout le temps que la comtesse la garda à son service, se vanter d’être avec les filles d’Erzsébet une des rares femmes jeunes à avoir pu rester en vie près d’elle longtemps. Mais la chanteuse avait néanmoins conscience que les disparitions régulières de servantes étaient suspectes, elle avait probablement aussi entendu des cris, vu des traces de sang…Ayant peur, elle demanda à partir. Erzsébet Báthory refusa, mais devant l’insistance de la chanteuse, elle accepta à condition d’entendre une dernière chanson. Alors que la jeune fille s’exécutait, Erzsébet attrapa au tison une braise incandescente qu’elle enfonça dans la gorge de sa victime, lui brûlant les cordes vocales et la tuant sur le coup : « Tu ne chanteras plus pour moi, alors tu ne chanteras plus pour personne . » affirma la comtesse. 




Erzsébet Báthory était selon toute vraisemblance bisexuelle ; on lui prête donc, en plus des tortures, des viols perpétrés sur les victimes.

Les paysannes des environs disparaissaient si régulièrement que, méfiantes, les familles de la région envoyèrent de moins en moins leurs filles travailler au château de Csejte. Qu’à cela ne tienne, les complices de la comtesse (Dorkó et Katalin Benická, ses gouvernantes, sa nourrice Ilona Jó, la sorcière Anna Darvulia et le nain János, dit Ficzkó) allèrent kidnapper d’autres victimes.

Mais là encore les ressources de la région finirent par s’épuiser. De plus, la comtesse aurait constaté que l’hémoglobine n’était plus si efficace depuis quelques années. Que faire ? Dorkó aurait suggéré de plus utiliser que le sang bleu des jeunes nobles. Erzsébet Báthory proposa aux filles des aristocrates locaux de venir prendre des cours d’étiquette chez elle. Evidemment elles disparurent toutes très vite, mais là, il y eut enquête puisque les origines des victimes faisaient qu’on s’inquiéta beaucoup plus. Il faut y ajouter la peur générée par  le fait que nul n’avait vu ressortir du château de Csejte les paysannes qui s'y rendaient précédemment , et le comportement public suspect de la comtesse. La femme qu’ Erzsébet avait faite mourir lentement dans un lac gelé, s’était ainsi préalablement vue égratigner la main d’un coup d’épingle alors qu’elle était venue demander la charité à la portière du carrosse de la noble dame.

 György Thurzó, cousin d’Erzsébet, se rend à Csejte le 29 septembre 1610, et trouva dans les caves des cadavres de victimes, d’autres blessées, et d’autres prisonnières attendant leur tour. Erzsébet Báthory et ses complices sont arrêtés, et un procès se  tient le 7 janvier 1611 à Bytča, présidé par le juge de la Cour royale suprême, Theodosious Syrmiensis de Szuló, et vingt juges associés. Dorkó et Katalin Benická, Ilona Jó, et le nain Ficzkó sont condamnés au bûcher. Mais Erzsébet elle-même ne participe pas au procès. Elle est en effet liée à la famille royale et le scandale doit être évité. (de plus, son mari aurait lui-même participé à certaines tortures avant sa mort: sa mémoire de héros national ne doit pas être entachée).

Elle sera en quelque sorte condamnée à la perpétuité mais dans sa propre chambre. L’entrée en sera murée, mais avec une ouverture en bas pour laisser passer les repas. On dit aussi que la chambre contenait un miroir pour qu’ Erzsébet s’y voie vieillir. On peut parler d’emmurement, mais est-ce si cher payé comparé à ce qu’elle a fait ? La comtesse meurt le 21 août 1614, et on murmure que son fantôme serait revenu hanter le château détruit…






Erzsébet Báthory a-t-elle commis toutes les atrocités et eu le grand nombre de victimes qu’on lui qu’on lui attribue ? Les aveux de ses complices furent pour certains arrachés sous la torture, d’où la conclusion qu’il y aurait eu exagération. Mais inversement, Erzsébet n’aurait-t-elle absolument rien fait alors ? Certainement pas non plus : pas de fumée sans feu !  Les rumeurs n’étaient certainement pas sans aucun fondement, et il est aujourd’hui admis qu’ Erzsébet Báthory s’entourait de jeunes filles lui rappelant ses propres virginité et jeunesse envolées, qu’elle était narcissique, et sadique-sans oublier les tendances saphiques. Elle aurait donc effectivement torturé certaines servantes et usé de leur sang à des fins cosmétiques, même si les bains sont douteux.

Photo de Bloodsnow


Sculpture de Todd  Macfarlane



 C’est paradoxalement ce pourquoi on se souvient d’Erzsébet Báthory : taper son nom sur n’importe quel moteur de recherches d’images ou galerie virtuelle la fera surgir tôt ou tard dans sa baignoire d ‘hémoglobine.(le sujet semble prisé par les photographes de mise en scène morbides, il inspire aussi des œuvres d’art telles que des sculptures très gothiques.)






La postérité d’Erzsébet Báthory est loin de se limiter à cela : on la cite comme source d’inspiration du personnage littéraire de Dracula avec son homonyme historique, Vlad Tepes qui empala à tour de bras, et Gilles de Rais qui fut soupçonné de centaines d’assassinats d’enfants. Erzsébet elle-même est à l’origine du roman Carmilla de Le Fanu, (1872) dont le personnage principal est un vampire.





 On devine sans peine l’apport de la comtesse au genre vampirique, notamment l’archétype aristocrate. Au point que le Dracula littéraire lui emprunte son titre de comte, alors que l’original était un voïvode (prince) de Valachie.




 En fait, on lui doit la construction du monstre tout court (ayant besoin de sang pour se régénérer)  puisque auparavant on avait du mal à distinguer le vampire du loup-garou (appelé dans ce cas un broucolaque) ou des autres spectres et revenants. Rien de moins!  On comprend mieux le surnom de "Comtesse Dracula".




De là à supposer qu’ Erzsébet Báthory était, ou serait devenue, vampire, il n’y a qu’un pas vite franchi.


Erzsébet selon Genzoman,  n'ayant plus rien d'humain.


Les biopics classiques, comme La Comtesse (de Julie Delpy, 2009) 




ou transposant dans un environnement plus moderne son histoire( Les lèvres rouges,1971)






ont abondé, mais les plus intéressants sont les personnages plus ou moins inspirés directement de la comtesse. 




 Erzsébet sous son apparence de reine des enfers.

























Par exemple la bande dessinée Requiem : chevalier vampire, qui se déroule aux Enfers, et dont les habitants sont pour la plupart des morts fautifs devenus vampires. Là-bas, (dans le tome 10) Erzsébet s’y révèle être rien moins que la femme du roi local, Vlad Dracula ! C’est ce qui s’appelle s’être bien trouvés. Tout comme dans le roman Comte et comtesse de Rose Christo où ils correspondent ensemble à travers les siècles.






Dans le manga de Lady Oscar, un récit adventice (non intégré à l’histoire principale et proposé en bonus de celle-ci) fait rencontrer à l’héroïne travestie un avatar français et transposé au XVIIIème siècle d’ Erzsébet , la comtesse veuve Elizabeth (traduction exacte de son prénom) de Montclair. Celle-ci se rend très vite suspecte à la réception où elle se rend, en disant  aimer « plus que tout au monde » qu’on lui dise qu’elle est belle…ou en éborgnant d’un coup d’épingle sa camériste, qui l’a légèrement écorchée ! Voilà qui semble déjà digne du personnage d’origine. D’ailleurs des rumeurs de vampires et de disparitions de jeunes filles sont bien entendu rapportées…Mais en prime, le meilleur horloger de France est porté disparu tandis que Mme de Montclair a été aperçue avec un jeune homme à la beauté surhumaine qu’elle dit être son neveu Lionel-de santé trop fragile pour se présenter en public.  




Le lendemain Oscar, son valet André, sa nièce Loulou et deux jeunes filles, Rosalie et Caroline, s’égarent dans les bois et trouvent refuge au château Montclair.




Au cours de la soirée, Caroline ne résiste pas à l’envie de chercher le beau Lionel. Laissée en sa présence, ce dernier la serre brusquement dans ses bras…et des pointes sortent de son corps, tuant la jeune fille sur le coup ! Lionel est un automate, ce qui fait de lui un avatar modernisé de la vierge de fer. Le constructeur est l’horloger disparu, et retrouvé par le reste du groupe dans les cachots, où il s’est retrouvé enfermé après avoir été énucléé (dans le but qu’il ne reproduise pas son travail, mais reste en vie pour entretenir sa création). Bien sûr, il rapporte des cas de jeunes filles kidnappées, torturées, et dont le sang servait de bain de jouvence à la comtesse. Oscar et sa petite troupe fuient après avoir accidentellement incendié le château, en sorte que cette fois la comtesse meurt spectaculairement dans le feu.   

Une histoire vraie, avec une triste héroïne plus narcissique que la Reine de Blanche-Neige, qui, on le voit, rivalise avec n’importe quel récit d’horreur qu’auraient pu inventer tous les auteurs gothiques de la terre.




Source: Crimes dans la soie, 30 histoires de milliardaires assassins par Pierre Bellemare.

jeudi 9 octobre 2014

L'emmurement




Oui oui, c'est le moment pour les légendes macabres...et j'avais dit que j'en reparlerais ....

Une pratique macabre s'il en est...Vous pensiez peut-être à la version qui conserve le sujet en vie? (prison à perpétuité) On parlait de "reclus(e)" au Moyen-âge quand des ermites urbains se retiraient du monde et priaient dans une cellule à la porte murée toute leur vie durant, vivant des aumônes de nourriture laissées par les passants à leur fenêtre à barreaux. C'est là notamment le personnage de la recluse, Soeur Gudule, dans Notre-Dame de Paris .




Ce pouvait aussi être une punition : La comtesse   Erzsébet Bathory (1560-1614) dont la vie était  tout un roman finit ainsi. Pour faire court, elle a tué plus de 600 jeunes filles pour se faire des bains de leur sang (j'en reparle ici). Ses complices furent brûlés  mais  Erzsébet y réchappa, étant noble. Elle fut enfermée dans sa chambre à la porte murée, mais n'y fut pas laissée à mourir d'inanition, il restait un passage sous la porte pour y déposer des assiettes.




Mais il sera ici question de la version fatale...Un mode d'exécution consistant à enfermer une personne vivante dans une alcôve ensuite murée-la victime mourant rapidement asphyxiée, dans un espace étroit, ou de faim, dans une pièce plus vaste. La tradition remonterait au mythe d'Antigone, condamnée à cette fin pour avoir enterré son frère après sa mort sur un champ de bataille et qu'il aie été déclaré traître à la cité. Toutefois elle se pendra pour abréger ses souffrances. On enterrait aussi vivantes les "vierges du soleil" dans l'empire inca ou les Vestales, elles aussi vierges consacrées de l'antique empire romain, lorsqu'elles manquaient à leur vœu de chasteté.

Ce type d'exécution serait néanmoins resté rare. Au château de Kuressaare en Estonie, on montre la pièce où un chevalier du XVIe siècle aurait été emmuré pour avoir séduit la fille d'un noble ...mais ce serait une légende!

Dans le film La Religieuse de Monza (1969) , la religieuse éponyme est également condamnée à l'emmurement après un accouchement illicite. Ce n'est cependant là non plus pas basé sur des faits réels.

Dans Le fantôme de Canterville, Sir Simon, le fantôme du titre, est mort de faim après avoir été enchaîné dans une cave murée par ses beaux-frères. Il expie ainsi la mort de sa femme.

Enfin, ces légendes ont peut-être inspiré les scénaristes de la série Angel pour l'épisode de 2001 L'appartement de Cordélia. Dans un studio juste loué, une présence obsédante se révèle être le fantôme d'une horrible  vieille femme.



 Sans oublier cette sensation de malaise au sujet d'une des parois...Il s'avère que la vieille dame, pour empêcher son fils Dennis de quitter la ville avec sa nouvelle fiancée, a ligoté et emmuré vivant ce dernier derrière la paroi!



Il s’asphyxie rapidement tandis que la mère meurt d'une crise cardiaque. Des décennies après, l'esprit de Dennis est libéré une fois la paroi cassée et chasse le fantôme de sa mère, lui même restant en tant que gentil poltergeist.



Bien réels en revanche étaient hélas les cas de "protection". Une pratique peut être héritée des sacrifices antiques et qui consistait pour protéger un bâtiment neuf à enfermer un être vivant dans ses fondations, animal...ou humain. Les enfants du monde anglo -saxon chantent encore la comptine London Bridge Is Falling Down ("Le pont de Londres tombe"). Elle ferait référence à un enfant emmuré dans le pont.

A une époque où les règles élémentaires de l'architecture était mal connues, on cherchait des moyens irrationnels pour prévenir des éboulements qui semblaient sans fondement rationnel non plus. La légende de Merlin l'enchanteur y fait allusion quand, enfant, il est capturé par le tyran Vortigern à qui une prédiction avait affirmé que les tours de sa nouvelle forteresse ne s'effondreraient plus une fois le mortier mêlé au sang d'un garçon né sans père-Merlin ayant été engendré par un incube, ou démon, invisible.  Mais Merlin fera une autre prédiction, exacte celle-là: se débarrasser des deux dragons qui, sous terre, et par leurs bagarres incessantes, renversent les fondations.



Il s'agissait aussi, le plus simplement du monde, de vouloir protéger les habitants des lieux. Les humains sacrifiés pour cela semblent avoir été un mythe, mais pour les animaux, ce n'est pas le cas, à commencer par les animaux dits du Diable (souvent compagnons des sorcières) : le chat, le crapaud, le hibou, le loup, la chauve-souris, le serpent et le phalène (ou l'araignée). Jadis, toujours à des fin de protection, il n'était pas rare de trouver des chouettes clouées à des portes de granges.



On ne compte plus les crapauds et les serpents retrouvés sous la pierre du seuil d'anciennes maisons bretonnes pour la même raison.

Cela menant presque inévitablement à des phénomène de hantise. Le jeune Chateaubriand, dans le château de ses parents, (Combourg, près de Brocéliande) ne pouvait trouver le sommeil quand il entendait (mais semble-t-il ne voyait pas) le bruit de la jambe de bois d'un fantôme unijambiste se promenant dans les couloirs...ou bien, quand il apercevait un chat noir également fantôme. Mais nul ne prenait alors ses peurs au sérieux. Des travaux tout récents ont cependant révélé la présence d'un squelette de chat dans la muraille!



La protection des animaux ( et la disparition de la croyance que certains seraient "maudits") a heureusement mis fin à ces cruautés.

Il a été dit plus haut que ce moyen n'avait probablement pas été employé souvent pour exécuter des humains, en tout cas en Occident. En revanche, dans le cadre du meurtre privé, rien n'est moins sûr. (et même après un crime perpétré ailleurs ce pouvait être un moyen commode de faire disparaître le corps, à condition de ne pas enfermer un chat vivant par mégarde qui attirera la police par ses miaulements comme dans Le chat noir d'Edgar Poe!)



Au XIIème siècle, au monastère de Borley (Grande-Bretagne) une nonne et un moine auraient eu une relation; une fois découverts, le moine fut pendu et la nonne emmurée vivante (mais l'histoire ne dit pas s'il s'agissait d'une exécution ou d'un lynchage?). Le fantôme de la sœur aurait souvent été aperçu la nuit dans le presbytère construit là ensuite, qu'on appelait la maison la plus hantée d'Angleterre (jusqu'à son incendie en 1944).





Au château de Veauce en 1560, le baron Guy de Daillone tomba amoureux de la suivante Lucie. Une fois le baron parti à la guerre, sa femme Jacqueline, jalouse,  jeta Lucie au cachot de la tour "Mal-coiffée" où elle mourut de faim. Depuis, son fantôme apparaîtrait régulièrement jusqu'à nos jours. (De façon similaire, on connait d’innombrables histoires de femmes nobles enfermées-voire emmurées- par des maris jaloux et qui revinrent en tant que dames blanches.Notamment au château de Trécesson dans le Morbihan, le château de Puymartin dans le Périgord ou le château de Pouancé en Maine et Loire. Le cadavre de la dame blanche concernée a d'ailleurs été retrouvé dans une pièce scellée à l'époque de la Révolution.)

Photographie réputée être du fantôme de Lucie.



Vu l'implication des oubliettes, le mode opératoire est un peu différent, mais l'issue est hélas la même. L'emmurement pouvait pour un visiteur égaré être même carrément involontaire  comme dit plus tôt pour Lucie de Pracontal piégée derrière un mur secret du château de Montségur-sur-Lauzon .(conseil, n'appelez pas votre fille Lucie si votre maison dispose d'un tel chausse-trappes! Apparemment ça ne porte pas bonheur.)

Il y eut probablement des tyrans pour enfermer et oublier des prisonniers qui périrent d'inanition dans les cachots. Cependant beaucoup d'oubliettes aujourd'hui observées dans les anciennes forteresses ne sont en réalité rien d'autre  que le système d'évacuation des latrines, et les ossements qu'on y retrouve éventuellement proviennent en réalité des reliefs de banquets jetés là.



Pour le reste, il est vrai que les culs -de-basse-fosse, ce n'était pas Byzance. Un prisonnier qui ne pouvait payer sa cellule dormait sur de la paille rarement changée dans un "trou" profond. Rien à voir avec le détenu nanti qui bénéficiait de tout le confort de l'époque, ainsi que du droit de recevoir. Y compris des prostituées pour le marquis de Sade, à la Bastille...

Dans ce "symbole de l'arbitraire royal", les émeutiers du 14 juillet 1789 ne devaient, déçus,  trouver que sept prisonniers: quatre faussaires, deux fous et un fils de famille emprisonné pour débauche à la demande de ses parents. Tous seront de nouveau enfermés ailleurs peu après leur libération. Pour que la prise de la Bastille semble un exploit justifié, on inventa le comte de Lorges, un prisonnier là depuis 40 ans, dans un cachot sans fenêtre où il devint aveugle, chargé de chaînes  et dont la barbe traînait par terre! Pourtant, en tant que noble qui pouvait payer, il aurait dû avoir droit au traitement VIP!



 Les révolutionnaires en viendront aussi à présenter une presse à imprimerie et une armure trouvés sur place comme des instruments de torture! Bref, la Bastille n'était pas la suite d'oubliettes sordides qu'on a décrit....Mais le grand et le petit Châtelet l'étaient, eux...(toujours à Paris).



Une coïncidence intéressante: les victimes humaines d'emmurement, (tant fictives que réelles) en dehors d'Antigone et de Lucie de Pracontal, sont:

-soit des personnes amoureuses ayant payé ce sentiment de leur vie
-soit, de surcroît, des religieux ayant failli à leur chasteté
-et très souvent le lieu devient hanté.

La victime revient, parce que, c'est le moins qu'on puisse dire, elle est toujours là...