mercredi 3 février 2016

La boîte à outils de l'écrivain, Mary Sues, exemples (2)

Après la définition de Mary Sue puis de ses catégories puis les trois premiers exemples, deux autres  illustrant le principe et permettant de mieux cerner qui elle peut être.


                                                            (Version vidéo de Wesley)

                                                            (Version vidéo de Tara)








Wesley Crusher de la série  Star Trek : La Nouvelle Génération par Gene Roddenberry (1987-1994) 




Stu classique, Stu avatar, Stu trou noir

Score de 58 points au test (Gary Stu).


Je l'avais dit précédemment, le concept de la Mary -Sue est né en 1973 en réaction à la palanquée d'OC pullulant dans la fanfic Star Trek de l'époque, à savoir des enseignes surdouées de 15 ans et demi. En tout cas c'est ce qu'était la Mary Sue originelle de Paula Smith qui popularisa le terme.





On imagine donc l'ironie de la chose quand une version Gary Stu d'un tel personnage débarqua dans La Nouvelle Génération, série qui faisait suite.

Initialement, on songea à introduire une adolescente nommée Leslie! Pourtant le genre du personnage fut changé. Et, en outre, il fut rebaptisé Wesley, deuxième prénom du créateur originel de Star Trek, Gene Roddenberry. Bigre!

 L'homme cherchait il à avoir un avatar dans son œuvre? Wesley embarque à 15 ans entre autres parce qu' il est le fils du médecin de bord. Reste qu' il est absurdement jeune, et censé être un génie. Une entité extraterrestre l’appelle le "Mozart du voyage de l’espace-temps".

Il fera fort dès le pilote, donnant des ordres à la place du capitaine sans écouter ce que dit ce dernier et devine les problèmes en clin d'œil malgré qu'il ne comprenne pas les graphiques utilisés.

Les autres personnages tantôt l'écoutaient aveuglément et le portaient aux nues, tantôt l'ignoraient initialement selon ce qui mettrait le plus Wesley en valeur. Mais qu'importe: ce dernier se mêlait de tout et résolvait toutes les crises (pour ce faire, la plupart des autres personnages devaient perdre pas mal de points de QI car eux aussi sont supposés être très qualifiés). Une grève des scénaristes en 1987 forcera à user de "scripts d'urgence" où Wesley sauvait la situation pour au moins trois épisodes.

Heureusement, le personnage pouvait être sujet au doute dès la deuxième saison, et sera jeté dehors à la cinquième, après une faute qui tue un de ses camarades, pour une fois, Wesley ne sera pas facilement pardonné (et les producteurs avaient-ils compris où était le problème avec le personnage?). Il ne reviendra que pour l’épisode final.
 

Le "Wesley" est l'ancien titre de la section "Creator's Pet" ("le chouchou du créateur") sur TV Tropes, et même le comédien interprète, Will Wheaton, déteste son personnage et s'exclame souvent "Tais-toi, Wesley!" dans sa review d'épisodes de Next generation. C'est à ce titre que Will Wheaton jouera volontairement son propre rôle de façon exécrable dans The Big Bang theory (il sera par exemple responsable d'une rupture entre deux personnages).


  Sheldon, l'un des protagoniste, le détestera rapidement et ira jusqu'à le surnommer "Jar Jar Binks de l'univers Star Trek".


En 2000, on trouvera dans le film hommage à Star Trek  Galaxy Quest,
le lieutenant Laredo dans la série télévisée du même nom; le pilote âgé de...10 ans.


20 ans plus tard, Tommy Webber, le comédien interprète, est incapable de garer un vrai vaisseau sans l'égratigner...une parodie plus qu'évidente du "prodige" Wesley (et de la Mary Sue originale?). Will Wheaton n'aura qu'un regret concernant Galaxy Quest, ne pas avoir pu jouer un fan exécrable dedans.



Dans Futurama, Cubert, le clone de douze ans du Professeur Farnsworth en serait également une parodie. Volontairement casse-pieds dans son épisode d'intro, c'est aussi le seul où fera preuve d'esprit scientifique (à la fin). Par la suite, Cubert  restera  un gamin ennuyeux à l'intelligence normale (comment apparemment beaucoup auraient voulu voir Wesley tourner).

Tara Duncan de la série de romans du même nom par Sophie Audoin-Mamikonian(depuis 2003).





Sue classique, Sue avatar, Sue trou noir, Sue relationnelle, Sue divine

Score de 125 (!) points au test (Irrémédiable  Sue) .



Attention, il est question ici de la version littéraire et non du dessin animé homonyme (qui n'a presque rien à voir scénaristiquement).





Le taux élevé de points (presque le double de Bella Swan pour ne citer qu'elle) assomme d'autant que Tara est un personnage principal et de plus destiné à la jeunesse, donc plus excusable qu'un personnage secondaire qui attire trop l'attention ou aurait débarqué sans crier gare. Mais l'accumulation des caractéristiques, surtout en matière de puissance, ne laisse  pas de doute.






On ne saura peut-être jamais à quoi ressemblait le personnage d'origine, créé dès la fin des années 80 par Sophie Audoin-Mamikonian. Quand elle propose son roman Les Sortceliers au début des années 2000, les éditions du Seuil sont intéressées à la condition que l'histoire soit retravaillée pour ressembler au dernier succès d’édition jeunesse d'alors, Harry Potter (la première édition du premier livre est notamment expurgée).

Et aussi une couverture effrayante qui ne me donnait pas envie de lire alors.


Au final, Tara telle qu'elle apparaît dans ce premier volume n'est encore pas trop exagérée et permettant l'identification; expliquant son succès. Âgée de douze ans, c'est une enfant presque comme les autres si ce n'est sa mèche blanche perdue dans ses cheveux blonds et ses brusques accès de télékinésie qui font croire à ses amis Fabrice et Betty, les seuls au courant, qu'elle doit être une mutante. Elle a perdu ses parents et a été élevé par Isabella, sa riche grand-mère, dans un château, certes, mais à ce stade c'est encore peu de choses.

Première révélation, elle n'est pas une mutante mais une "sortcelière", pouvant pratiquer la magie (tout comme Fabrice d'ailleurs). On voit le côté Harry Potter, mais ce qui va suivre diverge beaucoup. Deuxièmement, Isabella guide les deux enfants vers la planète Autremonde, où Tara est née, ce qui en fait techniquement une alien. Au cours du premier roman, elle se fait un ennemi du surpuissant méchant mage (un "sangrave")  Magister.




Et surtout, elle découvre que sa mère Selena est vivante et que son père Danviou est bel et bien trépassé, mais qu'il était néanmoins l'empereur du pays d'Omois. Subséquemment, Tara est une princesse impériale, et surtout l'héritière (son surnom officiel) de sa tante sans enfants l'impératrice Lisbeth. Le résumé des premiers livres reposait sur cet argument de vente, présentant Tara comme une princesse pas comme les autres, car n'attendant pas au fond d'une tour qu'on vienne la délivrer, mais aventureuse.



 Alors bien sûr, elle n'est en réalité pas la première à agir de la sorte; il n'y a qu'à voir les versions Disney des princesses de conte, voire même tout simplement l'héroïne des Douze chasseurs de Grimm, pas vraiment du style damoiselle en détresse non plus.



 Mais admettons.

Le premier tome est aussi l'occasion pour Tara d'obtenir des "couleurs magiques" qui forment un tatouage enchanté à son cou, la pierre vivante qui lui parle et peut doubler sa puissance et son familier Galant qui est un cheval ailé (et elle est la seule au monde à en avoir un).





Enfin elle rencontre plusieurs amis (Moineau, Cal, Fafnir) dont le demi-elfe Robin Mangi'l, beau comme  un dieu  et aux "yeux de cristal", (sic) qui bien qu'ils aient douze ans la trouve d'ores et déjà jolie. Mais là encore ça restait digeste.



Cela dit, les petits détails s'accumulent insidieusement au fil des tomes.

Ses fêtes d'anniversaire sur Autremonde se déroulent toujours avec faste et elle croule sous les cadeaux précieux alors que les anniversaires des autres personnages ne sont jamais mentionnés.




L'un des présents  est l'intéressante Changeline, petite boule de fourrure qui peut modifier instantanément son apparence. Du coup, elle peut devenir n'importe quel vêtement (voire armure) et par un mystère difficilement explicable peut tout aussi instantanément coiffer et maquiller. S'ensuivent les descriptions de vêtements de mannequin et des talons aiguilles portés par Tara bien qu'elle aie moins de quinze ans et vive dans un univers de high fantasy.





Voilà qui ressemble à une check-list des points essentiels des Sue, de plus en plus...la garde robe débordante et inappropriée, check. La beauté? Dès qu'elle approche quinze ans, Tara, très mince (bien que gourmande) et aux longs cheveux blonds dorés, est souvent décrite comme "éblouissante". Ses yeux seraient bleus marine bien que cette couleur n'existe pas dans la nature pour les humains. Check. Une marque inhabituelle? Sa mèche blanche, commune à tous les membres de la famille royale d'Omois. Check.

La richesse et le statut prestigieux? Déjà à l'aise sur Terre, Tara bénéficie sur Omois d'une fortune à rendre jaloux l'oncle Picsou (elle peut notamment acheter un tapis volant dernier cri et une suite dans un hôtel cinq étoiles dans le tome 7). Elle est destinée à devenir, non une reine, bande de petits joueurs, mais une impératrice. Check. Rappelons aussi qu'elle ignorait son statut de princesse pendant douze ans et s'arrangera pour échapper à l'étiquette le plus possible, ainsi que pas à un mais deux mariages arrangés. Check.



Le familier inhabituel et qui en jette (Galant possède des pouvoirs, et il est le seul au monde,  après avoir été transfusé par Tara)? Check. Les armes et objets uniques? (couleurs, pierre vivante, changeline?) Check.  Le nom interminable ? Oui, en vrai c'est Tara'tylanhem T'al Barmi Ab Santa Ab Maru Duncan (à vos souhaits!).Check.

Talents et surpuissance? Ce n'est pas seulement une sortcelière, elle est exceptionnellement douée et la pierre vivante multiplie les effets des incantations par deux: aucun duel perdu donc. En fait, elle est la seule à ne pas avoir besoin de prononcer d'incantations, ça fonctionne directement. Dans le tome 4, il s'avère que Tara  a été modifiée génétiquement pour que sa puissance soit incommensurable et  qu'elle pourrait faire exploser une planète façon bombe atomique. Et même avant ça elle pouvait faire des surdoses (tome 3). Sue divine, check.




L'appartenance à plusieurs espèces? Mieux: elle peut se transformer en dragon, ou bien devient (réellement) un vampire pendant plusieurs mois et il faudra du temps pour redevenir humaine.



Crue orpheline, accusée de crimes, bannie  (tome 7) kidnappée (à plusieurs reprises, au point qu'elle envisage de porter une pancarte "Veuillez ne plus m'enlever, merci"), rendue amnésique (tome 3), réduite en esclavage (tome 5 ),  victime de tentative de meurtre (tome 8), check. La torture sera pratiquée dans son cas de manière indirecte, non sur elle mais sur Galant. Reste que les gentils échappent rarement de façon générale au bondage et à la flagellation...Vous savez, pour les enfants!



Aimée de tous? Oui, qui la déteste est plus ou moins méchant ou jaloux (Magister, la garce alpha Angelica, son ex beau père Medelus qui devient Sangrave et Jar son frère sale gosse)  et tous les autres lui  facilitent la vie , veulent lui faire plaisir, ou veulent lui permettre d'accomplir son but, selon les capacités de chacun: Sue Trou Noir, check.

En fait, presque aucun garçon du cast principal n'échappera à l'attirance plus ou moins grande  pour elle. Robin, Jeremy'lenvir Bal Dregus  ( un exilé sur Terre), Sylver le fils de Magister, Cal,  Archange le fils du roi des démons et jusqu'au dragon Chem qui demande sa main pour raisons politiques.



 Seul Fabrice, son ami d'enfance, résiste quelque peu car se connaître depuis longtemps le fait la considérer comme une sœur. Reste que dans le tome 6, il admire sa "beauté éblouissante" une peu trop quand on sait qu'il a une copine (Gloria dite Moineau). Sue Relationnelle, check.

Elle est l’Élue de toutes les prophéties, attire la bizarrerie comme un aimant, fera le tour de plusieurs planètes à maintes reprises et  sera  des plus grandes guerres, a sauvé le monde plusieurs fois...check, je vous dis, check. Et tout ça avant le tome 8.





Mais alors me direz-vous, pourquoi ces romans sont célèbres? D'où vient la dévotion des "Taraddicts" qui prenaient d'assaut, cosplayés, les librairies lors des sorties de livres? Que les médias parlaient de "petite sœur française d'Harry Potter?"  Qu'Hollywood, toujours en quête de bons plans de fantasy à adapter depuis Harry Potter et Le Seigneur des Anneaux, parla de commander une série de films  à la fin des années 2000? ( D'ailleurs Narnia de CS. Lewis et La boussole d'or de Philip Pullman furent aussi adaptés dans ces années-là.) Qu'en attendant, une série télé d'animation fut lancée en 2010 et que la traduction anglaise commença aussi à ce moment-là?




Pour plusieurs raisons: d'abord parce que le style contribuait à contrebalancer les invraisemblances. Un humour et une ironie de plus en plus présents règnent au point que les titres de chapitres deviennent très longs (par exemple: "Quand on organise un mariage, c'est mieux si la mariée est d'accord.").

Des notes de bas de page se moquent parfois ouvertement des décisions des protagonistes façon Lemony Snicket (Les désastreuses aventures des orphelins Baudelaire).



 Cela rendait plus humaine Tara quand elle était confrontée à une situation absurde quelconque, comme lorsque une entité divine minuscule s'inquiète de savoir si elle croit en elle, sa première pensée est "Heu, pas des masses..." Tomber sur sa mère prenant le thé avec Magister était passablement hilarant aussi. Et bien que Miss Perfection, ça lui arrivait d'avoir des doutes et  de commettre des erreurs.



L'univers était assez riche, avec toute sortes de races humanoïdes, de créatures et d'objets magiques (comme le château vivant du Lancovit), ainsi qu'une faune et une flore originales, détaillées dans les annexes, malgré des noms plutôt simplistes (notamment à base d'onomatopées). Certains personnages sont attachants comme l'amusante Fafnir.

Notons aussi certaines fulgurances comme les chevaux ailés pourvus de griffes, plus aisées que des sabots pour atterrir sur les arbres, ou le phénomène du "langage universel" expliqué, car le sort Traductus fait entendre le français en autremondien et vice-versa aux concernés.

Donc on s'accroche jusque là. Mieux, certains détails dérangeants puisque caractéristique des Sues trouveront une explication à mi-course (à partir du tome 4 à 8).


Tara est une riche héritière? Oui, mais pas la seule: Selena était enceinte à la mort de son époux et dans le tome 3,  les jumeaux Jar et Mara se révèlent être les frères et sœurs de Tara. Il faut lui reconnaître un passé plutôt calme, et sa surpuissance disparaît à la fin du tome 4, son pouvoir se trouvant réparti entre ses amis (notamment Fabrice dont les talents sont faibles, non né d'autremondiens , mais influencé par la présence de la porte de passage entre la Terre et Autremonde depuis sa conception). Sa minceur non entretenue s'expliquerait par l'usage de la magie qui puise dans les graisses de l'utilisateur. Enfin, son succès auprès des garçons semble étrange, et celui de sa mère aussi?


En effet, depuis son veuvage, Magister soi-même, Various, son propre cousin (censé être gay, qui plus est) et Sandor son beau-frère sont tombés amoureux de Séléna. Et ce n'est pas tout: elle est sortie avec Medelus, Tea'l le loup-garou, un random boyfriend dont on n'a même pas le temps d'apprendre le prénom puisqu'il se fait tuer par Magister dès le début du tome 6...

Bizarre, ce succès, non?  Séléna finit par demander à sa mère des explications au début du tome 8. Isabella admet qu'elle ne voulait pas que sa fille sorte avec Danviou, et pensait atteindre cet objectif si quelqu'un d'autre tombait amoureux de Séléna (moi j'aurais plutôt tenté l'inverse, mais bon...). Pour ce faire, elle lança un sort aux effets semblables à un philtre d'amour  à son enfant- qui émane d'elle en permanence et marche sur  tous les hommes au point d'inverser les orientations sexuelles. Et Tara en aurait hérité de façon atténuée.



On remarque que Fabrice admet que ce qui l'attire avant tout, c'est la puissance, et pour lui Tara symbolise ladite puissance qui fut ce qui lui faisait envie. Comme il  l'a connue avant sa puberté, ça peut expliquer qu'il aie préféré malgré tout Moineau.

 Cal l'a connue après, mais  n'en était pas moins parvenu à garder la tête froide puisque tombé amoureux d'une autre, Eleanor (qui  sera tuée dans le tome 6). Et enfin, Jeremy sera tombé sous le coup du sort Attractus (équivalent aussi à un philtre d'amour)   dans le tome 4; une fois celui-ci levé, Jeremy admet n'être "pas amoureux" de Tara.


 Le "charme-personne" originel est sûrement l'explication pour Sylver, ce dernier préférant rapidement la naine Fafnir. Isabella lève son sort sur sa fille et sa petite-fille, et cela efface apparemment un charisme qui venait en pack avec le "charme-personne".

Cal remarque juste après qu'on voit maintenant certains détails déplaisants sur Tara comme un duvet au dessus de ses lèvres, et qu'elle n'est plus "éblouissante".

Désueifier un personnage qui l'est manifestement trop, c'est bien alors? Oui...à condition de s'y tenir.

Revenez en arrière, et ce sera pire encore qu'au début!

....Et c'est exactement ce qui va se produire.



Pourquoi, comment? SAM a-t-elle seulement conscience que son personnage est une Sue? On l'ignore, n'a jamais été évoquée sur son blog que son incompréhension face aux critiques sur l’aisance matérielle de Tara. Et bien , Iron Man et L'archer vert sont riches aussi, et néanmoins appréciés. Disons que le fait qu'elle soit riche est loin d'être le détail le plus dérangeant chez Tara.

Edit: grâce au blog Le monde fantasyque,   je sais à présent que SAM l’ignore...délibérément, ceci explique cela. Elle déteste les critiques et ne les lirait jamais...Un score aussi maximum pour une Sue ne peut s'expliquer en effet que par le fait de ne pas tenir compte du problème et partir en roue libre.

A partir du tome 8 environ (vers 2010) les qualités des romans quoique toujours présentes ne vont hélas plus suffire face à la "hyper sueification" de son héroïne, pouvant pousser à lâcher la lecture (ce fut mon cas).

Edit: Tout le monde ou presque s'accorde à dire que l'histoire a pris un mauvais tournant après les années 2010. Toujours d'après Le monde fantasyque ce n'est  pas un hasard, les livres ont été publiés par XO à dater de là, éditeur qui veut faire du chiffre. Et jusqu'ici (chez Seuil et Flammarion), les textes n'étaient pas seulement expurgés ou retravaillés, ils étaient réécrits en profondeur, tant Seuil tenait à son Harry Potter français. Ça explique donc la qualité supérieure des débuts (je reconnais que c'est inhabituel, je croyais qu'on s'améliorait en prenant de l'expérience), et la tentative de désueification entre les tomes 4 et 6 (on peut supposer que Flammarion sentait que ça n'allait pas le faire, si je puis dire). Tara Duncan chez XO, c'est telle que voulue par son auteur. C'est à dire:

D'abord, Tara regagne toute sa puissance magique passée au tome 5, parce que n'exagérons rien. Elle est toujours décrite comme merveilleusement belle par la suite...mais cette fois sans explication surnaturelle, donc c'est inné finalement. Et puis, curieux que Jar et Mara n'aient pas hérité du charme-personne pas vrai? Malgré l' absence du sortilège, Archange (plus beau que Sylver, lui-même plus beau que Robin...C'est possible vraiment?) demande sa main.

Archange aurait les yeux de cinq nuances de vert différentes. Vous avez dit multicolores?


Donc Tara est toujours un aimant à bogosses, mais c'est naturel en fait! (donc pire) Bref les explications rationnelles sont en réalité inutiles, renforçant le statut de Sue.

Robin, lui, était l'éblouissant Stu qui lui était parfaitement assorti jusqu'alors- il sera même transformé en elfe à part entière dans le tome 8. Mais cela ne suffira pas.

J'avais expliqué en détail ici tout le mal que je pensais de leur cause de rupture, à savoir la mort provisoire de Robin.



Plus exactement, après le tome 7 et sa résurrection, Robin sera d'abord  refroidi par l'idée d'avoir été influencé par le charme-personne, analyse ses sentiments, se rassure car ils sont en fait réels (Et oui! Pauvre elfe...). Mais dans la dimension démoniaque, non seulement Archange embrasse Tara qui ne se défend guère, mais une démone polymorphe se transforme en Tara pour coucher avec Robin (ah oui, et il a 16 ans).



Alors oui, on aurait pu penser que Robin jusqu'alors plutôt intelligent aurait dû se rendre compte de la supercherie. Pour justifier qu'il  fasse soudainement pousser vers un siège éjectable, il devait en effet perdre inexplicablement quelques points de QI. Mais n'empêche: était-ce bien justifié de le jeter comme un vieux kleenex, vu que tout comme sa fausse nouvelle de mort, tout cela n'est absolument pas sa faute? Mais personne ne quitte Tara, en bonne Sue, c'est elle qui jette les hommes.



L'identité du remplaçant à de quoi faire suffoquer: Cal. Le comic-relief à la Ron Weasley et Sam Gamegie, l'humain banal et normal, le bon copain (de Tara et Robin).  Seule, Mara Duncan s'intéressait à lui. Dois-je rappeler que le charme-personne n'avait pas du tout fonctionné sur Cal? Mais enlevez-le  et hop, raide dingue de Tara du jour au lendemain-était bien la peine de d'évoquer ce sort, au final?

La belle affaire, me diront certains, dans la vraie vie des tas de gens connaissent des ruptures, alors? Alors vraie vie et littérature n'ont rien à voir, c'est le problème.



Des couples de nos amis peuvent se séparer, on peut en être initialement triste, mais eux comme nous s'en remettront un jour. On n'a guère vu que leur mariage comme événement important, et il y  a de forts risques qu'on aie pas été là à leur première rencontre. Pour le reste, à moins d'être des voyeurs avec des caméras partout, nous n'avons pas vu nos amis se déclarer, leur premier baiser, leur demande en mariage, leur première nuit ensemble. Nous avons su subitement qu'ils étaient ensemble quand ils nous l'ont annoncé, (et nous nous doutions  peut-être de rien jusqu'alors)  et leur rupture a été apprise tout aussi subitement.

Pour un couple de fiction, c'est très différent:  le lecteur ou spectateur est suspendu aux progrès du couple qu'il pressent être en formation. Tous les événements importants précités, on les a vus, on était aux premières loges (oui, même la première nuit) et certains (notamment les déclarations) peuvent arracher des hurlements de joie aux fanboys ou girls bien qu'à priori tout cela ne les concerne pas directement.



La prochaine fois qu'on se moquera de vous pour prendre ceci trop à cœur, répondez que la seule façon d'être aussi impliqué émotionnellement dans une histoire d'amour pour vous, serait d'en être l'un des deux acteurs (et , là aussi, on a forcément assisté à toutes les étapes).

Outre l'erreur de penser qu'une rupture avec un love interest important est un élément vendeur dans la fiction, sachez qu'elle ne peut se justifier que de deux façons:

-Dans un média filmé, l'absence d'un acteur due à sa mort ou sa soudaine démission.

-Dans l'univers des soap operas et des shojos mangas où c'est une règle.

Mais pas dans de la high fantasy jeunesse où on a d'autres chats à cajoler, navrée.

Quand on envisage dès le début d'éloigner un love interest au profit d'un autre, les auteurs suivent habituellement un même schéma, non par manque d'originalité, mais parce qui si ce n'est pas respecté, le lecteur ou spectateur se sent, sinon trahi, arnaqué :


-Avec un love interest provisoire:

-La première rencontre est anodine ou a déjà eu lieu

-Le love interest est ennuyeux, ou goujat, ou exigeant, ou casse-pieds

-On peut aussi découvrir assez vite qu'elle ou il est infidèle ou tout du moins reluque tout le temps les autres

-Son passé, sa personnalité sont peu fouillés; on ne sait pas grand chose de son entourage.

-On ne sait parfois pas quelles qualités elle ou il a.

-L'héroïne ou le héros a des doutes à son sujet.

-Leur histoire se termine relativement vite.



C'est ainsi que dans Ma super ex (déjà, le titre...) Matt Saunders pense que Jenny/G-girl, sa copine, est folle à lier et il préférait déjà Hannah, sa collègue, au début.



Que dans Burying the Ex (le titre, toujours), Max trouve vite Evelyn possessive et envahissante- le contraire de la gentille Olivia qu'il rencontre après.



Que dans Harry Potter, celui -ci constate vite que sortir avec Cho Chang n'est pas le nirvana qu'il imaginait vu qu'elle pleurniche.

 Que dans Nuit blanches à Seattle, Annie laisse tomber son fiancé ennuyeux comme la pluie  puisque tous les signes du destin pointent en direction de Sam.



Que dans Love Actually, Jamie est vu environ six minutes avec sa copine (qui l'appelle "Gros naze") avant qu'on réalise qu'elle le trompe avec son propre  frère, laissant à Jamie le champ libre avec la femme de ménage Aurélia.



 Que dans Scott Pilgrim, Knives Chau est rapidement évoquée pour vite laisser place  à Ramona Flowers dont Scott faisait des rêves prémonitoires (quand même).



Et dans Dragon Ball, certes Bulma était avec Yamcha, mais ils étaient des personnages secondaires d'un manga d'action (et non romantique) dont l'histoire était peu suivie, (parce que ce pauvre Yamcha  a été un peu oublié aussi), dans une relation chaotique (souvent interrompue) expliquant qu'elle se mette aisément avec Végéta après.

Si d’aventure un love interest du passé est évoqué (en flash back genre Lana Lang, par exemple) c'est pour cela: qu 'il ou elle y reste, dans le passé.

Tralalère-eu.



Quand une ancienne flamme revient, c'est toujours pour constater que c'est fini, si nous ne l'avions jamais vue avant: Katma Tui et Hro Talak, les ex respectifs de John Stewart et Shayera Hol, ne serviront qu'à confronter ces derniers dans leurs sentiments dans la version animée de la Ligue des justiciers.





La trahison de Shayera pousse certes John à sortir avec Vixen dans la saison suivante...Mais attention, Shayera, nous avions vu son histoire au complet, nous la soutenions à 100%, ce n'était pas une Katma Tui pour la simple et bonne raison que son histoire avec John n'était pas arrivée hors écran, à elle.

Sans surprise nous apprendrons  que John et Shayera se réincarnent ensemble depuis 2000 ans, qu'ils sont destinés à avoir un fils, et finalement Vixen meurt dans la BD qui fait suite.



Si malgré tout un premier love interest est présenté de manière positive, c'est qu'il ou elle tirera sa révérence en décédant (Gwen Stacy ou la princesse Yue) seule façon que l’héroïne ou le héros ne paraisse pas goujat en se trouvant quelqu’un d'autre.


Et quinze ans séparent les deux.



-Avec le love interest définitif:


-Elle ou il est là pour longtemps

-Le héros ou l’héroïne lui fait des promesses et des déclarations dithyrambiques

-La première rencontre fut inoubliable

 -Ils n'ont d'yeux que l'un pour l'autre, ceux qui s'interposent n'ont pas leurs chances

-Ils ont fait des choses fortes ensemble: s'opposer à un veto parental, survivre à un virus, à un kidnapping par un concurrent jaloux, se sauver mutuellement la vie...

-Le love interest a un passé, une famille, et une personnalité explorés

-Elle ou il a des qualités qui le rendent irremplaçable et attachant.





Toutes ces petites choses qui tissent le fil rouge du destin, et qui font que le lecteur ou spectateur est émotionnellement impliqué.





Petit schéma, pour peu qu'on ne serve pas du love interest bourré de défauts, on le présente de deux façons immuables selon lequel doit rester:












Alors attends voir...Là pour longtemps? Robin et Tara c'était une histoire qui durait depuis le premier tome, jusqu'au huit, soit plus de la moitié. Donc le court laps de temps, ça ne tient pas.

Démonstrations d'affection? Plutôt deux fois qu'une, ces deux là furent à deux doigts de coucher ensemble...à moins de quinze ans (c'est quand même exceptionnellement chaud pour un roman accessible à partir de neuf ans). Loin d'être un "love interest satellite" sans personnalité, on savait que Robin était né d'un mariage mixte, qu'il souffrait de sa double nature, que sa mère était une érudite humaine maladroite, etc.

La déclaration touchante, on l'avait eue même si Tara était transformée en bébé à ce moment (changement d'âge, check).Val'a l'elfe violette tentera de séduire Robin, tout à fait vainement. Une dingue avait tenté de le tuer pour prélever le sang de Robin et rajeunir donc ce n'est pas non plus comme si on ne s'était jamais inquiétés pour lui.

Autre suspens à se ronger les ongles,  Jeremy et le sort d'Attractus ou  Lisbeth qui voulait interdire la relation de sa nièce avec un demi-elfe furent autant d'obstacles placés sur le chemin qui avaient consolidé la relation à l'époque.  Le tout alors que le "remplaçant" était déjà là et n'en avait rien à faire, courant alors après Eleanor; la suspension d'incrédulité en devient de plus en plus dure à obtenir...(car pour le coup, on les sent, les personnages de fiction que l'on peut "shipper" ou "mettre ensemble" au gré de l'inspiration du moment)



Et bien sûr, après la mort apparente de l'elfe, il y eut cet incroyable cirque du deuil de Tara, hébétée et pleurant des mois durant , sous la surveillance de Cal, cet agaçant moustique qui "ne la laisse jamais tranquille". Vous le sentez, là, le grand amour?



Mais, me dira-t-on, si la relation de Robin et Tara était construite comme une histoire devant durer et pas du tout provisoire, c'est parce que c'était ce qui était prévu de base, non?

Je pense de même, ce qui expliquerait bien des choses. L'incroyable prolificité de SAM  (12 tomes au lieu de 10 pour  Tara Duncan, suivis d'un "deuxième cycle", les dérivés La Fille de Belle, ou le roman Les autres mondes de Tara Duncan -coécrits avec un fan, Thomas Mariani-, la série  Indiana Teller, les romans pour adultes La Couleur de l'âme des anges et  La Danse des obèses, les albums Clara Chocolat...)




et le fait que chaque roman soit un cale- meuble de centaines de pages laisse à supposer que tout ceci se déverse au gré de l'inspiration; plutôt que le fruit d'un plan mûrement réfléchi avec une fin déjà écrite comme l'avait fait JK.Rowling avec Harry Potter.

Edit: Bon, le "deuxième cycle" s'est mal vendu et son premier tome (Tara et Cal) s'est vu rétrograder au rang de treizième tome de la série précédente. La Couleur de l'âme des anges, La fille de Belle, Les autres mondes de Tara Duncan devaient chacun commencer une nouvelle série mais n'ont pas de suite pour cause de résultats de ventes décevants. Idem pour Dan et Célia, le roman à propos des enfants de Tara. Le premier tome est sorti en 2016 mais toujours pas de suite depuis. La logique derrière tout ça? Commerciale, apparemment.

Et bien là encore: je ne  conseille pas du tout de changer d'avis en route si on n'a pas déjà réfléchi à la fin.

Et d'abord, pourquoi est -ce arrivé? La série d'animation de 2010 n'eut qu'une saison car son absence de ressemblance avec les livres ne convainquait guère; Tara semblait avoir toujours été sur Terre tout en connaissant la magie.


Toutes les semaines (format non feuilletonnant) elle devait démasquer un vilain sorcier, fin de l'histoire. Aidée, bizarrement, des seuls Cal et Moineau, (pourtant pas terriens) tandis que  Fabrice (oui, pourtant, il est terrien), Fafnir et Robin  intervenaient de façon exceptionnelle.


                   (mais le générique était si chouette que j'ai commencé à lire à cause de ça...)


 Un univers parallèle, de toute évidence, expliquant Robin qui n'est pas son copain cette fois, soit. Mais, Cal là tout le temps, ça a dû servir de source d'inspiration...(pour une version qui n'avait pourtant rien à voir je le rappelle).

Et d'ailleurs il draguait tout ce qui bougeait...


Et voilà comment on se retrouve dans le tome 11 avec Robin dans l'absurde  rôle de l'ex encombrant qui sert à conforter l'héroïne dans son choix actuel. Problème: on l'a vu dans les exemples précédents, ça ne fonctionne qu'avec  un ou une ex que nous n'avions jamais vu(e) à l'oeuvre avant.

D'habitude, un ex rejeté mais que nous connaissons bien arrive toujours à ses fins parce qu'on est à ses côtés (cf Shayera Hol, plus haut. Et aussi Peter dans Spider-man 2, Superman dans Superman returns, etc).

"Elaiiiiine!" Pardon, MJ!!!!!!!!!!


Vous savez, exactement la chose qui se produisait au même moment avec Moineau (alors fiancée de dépit à Jeremy) et Fabrice!  Oui oui, celui-ci aura finalement le droit de garder son premier amour bien qu'il l'aie trahie et torturée volontairement. De son côté, Robin...n'avait rien fait de mal, c'était plutôt Tara qui avait deux ou trois trucs à se reprocher du style l'avoir tué avec des fantômes déchaînés ou de l'avoir trompé. Je vous laisse réfléchir  à la presse que cela donne à l'abus domestique.



Relire les premiers tomes aujourd'hui, c'est comme regarder le premier Pocahontas: une impression douloureuse de perte de temps quand on connait la suite, et à quoi servent les passages romantiques à présent sinon à faire sembler les personnages de peu de foi?






Un love interest convainquant qui a été là longtemps et qui n'est pas mort? Irremplaçable, désolée les enfants, c'est pourquoi d'ailleurs Marvel galère tant à remplacer Mary Jane dans Spider-man et n'est toujours pas parvenu à la faire oublier.





Même en vrai, un ou une ami(e) qui a apparemment un choix amoureux discutable, style la sœur ou le frère de son ex, on évitera de le ou la juger: on n'était pas là pour savoir si ça se passait si bien avec l'ex.


Il y  a une raison pour laquelle un scénariste évite de montrer, ou de trop nous montrer, la relation avec un love interest (sans trop de défauts, s'entend) destiné(e) à se faire remplacer par son prédécesseur ou suiveur: qu'on ne juge pas le protagoniste comme étant immoral, parce que là par contre on était là pour savoir comment c'était.

D'une part, que Tara nous soit montrée en détail larguant un gentil petit gars pour leur meilleur ami, c'est...

                                  (et du coup Cal aussi n'a pas l'air très honnête lui non plus)


Et d'autre part, nous sommes censés toujours apprécier cette "sympathique" héroïne malgré tout? Deux mots: Mary Sue. Ne pas assumer les conséquences de ses actes en la matière est juste caractéristique.

Et nous n'en sommes qu'au tome 8, je l'ai dit. Il n'y a pas d'autres éléments ou péripéties caractéristiques supplémentaires, quand même?

...Si.




La classe infinie de la Vilaine Sue/ Sue désagréable? Tara l'a aussi, en raison de la part d'elle-même qui s'appelle "La reine noire" et qui apparaît dans le tome 8. Et qui, dans le suivant, évolue en double maléfique.



La mariage arrangé? Tome 10. Le mariage arrangé repoussé? Même tome. Morte puis ressuscitée? Tome 9. Mariage prématuré? Tome 12. Enceinte ? Même tome. Enceinte très jeune? Même tome. Mise au monde de jumeaux mixtes? Même tome. Tous ces détails justifiés en partie par sa très longue histoire mais quand même.





Bon, mais on ne sait pas si c'est une Sue avatar, non? C'est vrai qu'on ne peut que le supposer, mais il y  a certains détails troublants. Bien que dans son cas la couleur ne soit pas hors du commun (noisette), SAM a aussi les yeux foncés -et est blonde. Elle est française, Tara a été élevée en France. Elles ont eu deux enfants, et puis...Comment dire? Il y a l'histoire du lignage.



















Les Mamikonian ont dirigé l'Arménie entre les IVe et VIIIe siècles, jusqu’à ce qu’elle soit disloquée entre trois empires, ottoman, perse et russe. Jusqu'à la réunification au 20ème siècle, mais où le pays deviendra une république.

Cela n'empêchera pas les royalistes arméniens d'exister, et ils établiront que le réalisateur français Francis Veber est le plus proche parent de la lignée éteinte.



Ce dernier sera pas intéressé par le titre de chef de famille, qu'il laisse volontiers à sa nièce, Sophie Audoin. Cette dernière, outre d'accoler ce nom de famille au sien, se fait depuis appeler princesse malgré qu'il s'agisse d'un titre de courtoisie, et non légal. Car l’Arménie n'est pas près de changer de régime, mais aussi parce que ça n'a rien changé à son train de vie.

Décevant, non? On comprend mieux pourquoi Tara (et les trois quarts des personnages féminins) est une princesse, au sens légal du terme, mais aussi pourquoi elle devient une impératrice effective: il y  a du mieux par rapport à la réalité. Sue avatar, check.

...Comment dire, à ce stade, même les dessins des couvertures des derniers tomes ne cachaient rien du côté...grandiloquent de l'héroïne. Et, je le rappelle, avec le fameux second cycle, ce n'est même pas fini et le nombre de points n'a sans doute pas fini d'augmenter.




Edit: En effet! Dans Dan et Célia, Tara s'avère ne pas vieillir, et elle gardera constamment l'apparence de ses 18 ans. Considérez donc le score d'être en réalité de 126.

Et de plus...et bien, Tara n'est pas la seule Mary Sue de l'histoire! Pour commencer, les gens banaux ou même laids n'ont pas l'air d'exister parmi les humains (les démons étant au contraire atroces).



Seule Betty, l'amie d'enfance terrienne, est une exception apparente, étant en surpoids avec des lunettes.Elle se fait kidnapper dans le tome 5, est envoyée sur le continent interdit, les conditions d'esclavage la font maigrir, elle perd ses lunettes, mais se fait aussi défigurer. Heureusement après l'avoir délivrée, Tara réussit à guérir son visage. Donc, voilà Betty devenue une "ravissante jeune femme" après être revenue sur terre. Trois tomes plus tard, elle a il est vrai retrouvé son poids, mais ensuite, j'avoue ne pas avoir trouvé si ça avait encore changé. Edit: non, elle serait restée en surpoids.

Et sinon? Fabrice a des longs cils qui font craquer les filles et une stature d'athlète, Séléna et Moineau sont de ravissantes brunes, Lisbeth a tout du top-model, Maître Chem fait en réalité semblant d'être vieux et peut avoir une apparence plus plaisante, Robin était le plus beau garçon en vue jusqu'à l'arrivée de Sylver, puis Archange, chacun encore plus beau que le précédent (parce qu'ils étaient prévus comme les nouveaux love interests, peut-être, et Tara ne peut sortir qu'avec le plus beau des hommes pas vrai?).  De fait, on n’évoquera la beauté "d'ange" de Cal qu'une fois élevé au rang de Love interest. Edit: Il subit aussi une brusque croissance et poussée musculaire à ce moment- là. De façon générale, à partir de ce point, les garçons de l'histoire sont tous des beaux gosses aux gros abdominaux mais petit cerveau.

  Même Magister se dit magnifique derrière son masque et il n'y aucune raison de ne pas le croire.

Tara n'est pas la seule à être une princesse (même si c'est la seule à être impériale avec Mara), Moineau est la nièce des souverains du Lancovit, la dragonne Charm est l'héritière de sa planète, la mère de Sylver était aussi une princesse-dragon, Sanhexia est la fille du roi des démons,   et jusqu'à Fafnir dont le clan dirige les nains.



Dieux de l'amour, tout ce petit monde? En quelque sorte: les personnages sont nombreux, ils reviennent tous à un moment ou à un autre, et, surtout, ils trouveront tous chaussure à leur pied (ou aimeront quelqu'un sans espoir comme Magister avec  Selena, ou Satila avec Maître Dragosh) .

 Des couples "bêta" comme Moineau et Fabrice, Fafnir et Sylver, Maître Dragosh et Selenba? Pourquoi pas.

Mais aussi Mara et Archange, Chem et Charm, Lisbeth et Various, (il n'était pas gay?) Xandiar et Séné?  Le grand oncle de Tara et la reine des amazones?  Menelus et la traîtresse du premier tome?   La fille du président des vampires et son elfe coiffeur? Jar et Betty? Attends, elle ne sortait pas déjà avec un loup-garou?  Jeremy et Sanhexia, sœur d'Archange? Heu comment dire, au bout d'un moment ce n'est pas qu'on se fiche de ces détails, (qui ne font pas avancer le récit) mais presque, vu que c'est de l' high-fantasy jeunesse et non du roman Harlequin?



Ni  une sitcom pour ados, bien que Sanhexia semble une caricature de Tara (Cheveux blonds et roses, folle de mode, à talons aiguilles et explicitement comparée à Paris Hilton: ça ne fait plus trop fantasy).



A ce stade on aurait presque dit  un jeu: "Faisons sortir ce nouveau personnage avec cet autre, rencontré X tomes en amont et à qui elle ou il n'a jamais parlé." (Je n'arrive pas à me rappeler tous les noms, c'est vous dire). Et avoir autant les hormones en surchauffe ça joue des tours à force, comme Jeremy qui embrasse Catherine, qu'il vient de rencontrer. Sauf qu'elle est la sœur dont il est séparé depuis la naissance.



Ca n'arrange guère une Mary Sue d'être dans une histoire qui perd son objectif  et change de genre en cours de route, on tombe dans le changement des règles de l'univers bien que ce soit un personnage présent depuis le début.

Par perdre de vue l'objectif, je veux dire...Vous vous souvenez, Magister, le grand méchant et tout? L'atmosphère romantique semble l'avoir affecté car conquérir puis ressusciter Séléna semble peu à peu devenir son seul objectif. Et ce n'est pas tout: on ne saura jamais qui il est. Parfaitement: ce qui aurait dû être la grande révélation du tome 12, sera qu'il ne ne démasquera pas et qu'on ne connaîtra pas son vrai nom. En revanche, très cher lecteur, vous n'ignorerez rien de qui sort avec qui.





Hélas, contrairement à Bloom dans Winx, tout cela n'atténue pas ses propres exagérations tant Tara explose pas mal de scores, à commencer par ceux de ses amis, alors que Bloom avait des résultats proches de ceux qui l'entouraient. On a donc plus l'impression d'une pile de Sues que notre héroïne surpasse néanmoins de loin!


On s'en fiche, on l'aime quand même? Et bien comment dire...Ce fut le cas jusqu'à un certain point.  L'acmé du succès de la série était aux alentours de 2009-2010, mais ensuite, vous le savez, la série d'animation n'eut qu'une saison, et ensuite, comment dire....

On entend beaucoup moins parler de tout ceci. Hollywood semble avoir classé l'affaire, peut -être effrayé par le nombre de tomes encore plus élevé que Harry Potter, Le Seigneur des Anneaux ou Hunger games, sans même être passé par le stade "premier film sans suite" comme Eragon et La boussole d'or. Il n'y eut, en 2013, que le court métrage Origines (sur le passé d'Autremonde) diffusé une fois au Rex.

Avec SAM dans le rôle titre: Ajoutez-y sa présence dans le clip du dessin animé et qu'elle citée dans les romans comme  une biographe officielle, et l'hypothèse d'avatar se confirme.
Edit: Au temps pour moi, il n'a pas été diffusé! Seuls 300 tickets sur les 3000 prévus se sont vendus, donc la soirée, et le DVD de celle-ci, ont été annulés.

Une comédie musicale prévue n'eut pas lieu non plus. La traduction anglaise fut abandonnée au tome  2.  Bizarre que l'éditeur aie changé si souvent (Seuil, France Loisirs, Pocket jeunesse, Flammarion, et maintenant XO même si l'on ignore si c'est lié).

Edit: C'est lié! Et c'est d'ailleurs la clé du problème. Seuil aurait contribué à créer la saga de fantasy marrante des débuts, conscients de ce qu'il fallait garder ou non. SAM n'aurait jamais accepté cela, expliquant la migration chez Flammarion, puis, faisant face aux mêmes restrictions, chez XO. SAM serait allée jusqu'à qualifier les têtes pensantes du Seuil de "crétins"...Et depuis, chez XO (y compris le premier tome, réédité là-bas tel qu'il avait été écrit au départ) vous pouvez lire les livres en version "brute", tels qu'ils sont rédigés  directement. Ça explique beaucoup de choses à commencer par les fautes de frappe et les chapitres de longueurs inégales (les uns très longs et les autres très courts).

On entend beaucoup moins parler de comparaison avec J.K Rowling, et beaucoup plus du problème principal de son héroïne.

Qu'on se souvienne de la page parodique de la "desencyclopedie" qui de très bonne heure la qualifiait déjà de Mary Sue.



N'en jetez plus, on a trouvé Mary suzilla.


Edit: Je croyais les ennuis de la saga circonscrits aux produits dérivés, mais outre que les autres romans, comme Indiana Teller,  ne voient pas aboutir leurs adaptations souhaitées, ça ne fonctionnerait plus davantage sur le plan littéraire malgré qu'il continue de sortir de nouveaux romans: aucun n'arrive à enclencher de "second cycle" se vendant bien.

J'avais dit, au début, que les Mary Sue n'empêchent pas le succès...Mais en y réfléchissant c'est surtout vrai au départ, quand l'histoire n'est pas assez longue pour qu'on aie la certitude qu'un protagoniste est concerné. Par contre, après un certain temps, quand on sait de manière irréfutable qu'un personnage est une Sue, et qu'il/elle l'est de notoriété publique, là ça sent le sapin pour l'oeuvre concernée, dont la réputation va plonger (suivez mon regard vers Twilight et Smallville).

Puis son chiffre d'affaires baissera aussi, à moins d'arrêter là ou de faire disparaître la Sue. Sinon? Vous avez le résultat sous les yeux, tout ceci est dans le but évident de faire du chiffre, mais les gens marchent beaucoup moins dans la combine. Une fois qu'une Sue est certifiée, elle a tous les risques d'effectivement plomber l'auteur, fut-il un professionnel. A bon entendeur...



4 commentaires:

  1. Très bonne analyse, un bon résumé de la chose même si (je trouve) la puissance de Tara n'est pas assez le sujet de la critique. Une puissance qui je trouve enlève du sens à l'intrigue avec un "dès que la cause limitante x a été enlevé c'est la fin des méchants" et une chose qui en plus enlève tout honneur aux autres personnages qui ne seront qu'un moyen de transport pour atteindre le summum de l'intrigue.

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  3. En voilà une bonne critique, de bons arguments bien développés.
    Alala la fameuse ruptur avec Robin... Qui n'a pas vraiment lieu d'ailleurs, Tara entamera sa relation avec Cal avant d'avoir réellement mis un point finale à la première et même saisira l'occasion du "viol" de Robin pour le quitté définitivement... pour infidélité...

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  4. (Pardon, je n'avais pas vu vos commentaires, j'en ai peu.) Viol il y a bien eu, preuve qu'on cherchait un prétexte facile...

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