La première fois que j'en ai entendu parler, c'était en 1995 (auparavant, le réseau français Cyclades, par exemple, était resté confidentiel) . Et comprendre alors à quoi ça servait était particulièrement difficile tant qu'on avait pas eu l'occasion de voir la chose en direct (C'est pourquoi David Abiker disait que son fax devait suffire, à l'époque).
D'autant plus confus qu'en 2000 France Télécom (Wanadoo pour ses services internet, devenu Orange avec la fusion avec ces services) parlait dans ses pubs du net, comme de quelque chose de courant alors qu'il n'était possédé que par 3% des français d'alors.
Preuve qu'on ne comprenait pas grand chose à ce "drôle de truc", seuls les petits génies de l'informatique s'y risquent dans les séries du début des années 2000. D'autant qu'il fallait ajouter des tas de choses au pack de base, comme un "lecteur multimédia".
Dans l'épisode Intolérance de Buffy contre les vampires (1999), Willow est consignée dans sa chambre, mais avec son ordinateur portable. Pas de stupidité de la part de ses parents: ils ne devaient même pas encore savoir que les mails existaient. Oz, si, donc il a l'idée lumineuse de la joindre depuis un ordinateur de l'école. Il faut voir sa tête soulagée et son "Nous sommes connectés!" mais rappelons que ça prenait du temps.
Similairement dans l'épisode Destruction virtuelle de Lois et Clark, Clark demande s'il n'existe pas "un système qui connecte les ordinateurs?", internet, pour ne pas le nommer.
L'activité était alors décrite comme étant "surfer sur le net" (l'un de vous l'a-t-il utilisée récemment? Je ne crois pas). L’adaptation drama du Garçon du train montre ledit garçon, interrogé par sa love interest Hermès, répondre qu'entre autres loisirs il "surfe sur le net" (il demandera, en bon nerd, des conseils de drague aux utilisateurs d'un forum). Et elle en conclut qu'il surfe sur la mer, n'ayant jamais eu l'occasion de le faire elle-même sur internet (oui, c'était le tout début des années 2000 seulement).
Et les fournisseurs d'accès de tout ceci? La plupart ont disparu comme AOL, Club internet, Frisbee, Mageos et ses pubs évoquant la difficulté à se connecter.
Au début c'était effectivement compliqué puisqu'il fallait s'assurer que votre ordinateur avait un modem. Idem avec les moteurs de recherches, qui au début n'existaient carrément pas, donc vous aviez intérêt à savoir où vous alliez.
Ce qui était relativement possible, avec un nombre limité de sites. Plus tard, certains moteurs vont émerger, comme Lycos et son brave toutou (disparu aussi), Altavista ou Yahoo, avant de se faire détrôner par Google.
Et si vous n'y preniez garde, des moteurs de recherches comme Bing! pouvaient s'installer sur votre barre de recherches, le style que personne n'utilise d'habitude.
Ça pouvait vite ressembler à cela. |
A ce propos, saviez-vous qu'au début internet explorer était utilisé en exclusivité avant que d'autres navigateurs n'existent?
Un peu lent peut-être? |
Le payement à la minute (8 à 16 francs de l'heure) aura au début des années 2000 d'autres alternatives. Je ne sais pas trop comment ça fonctionnait, mais régulièrement on trouvait dans les magazines des CD rom publicitaires destinés à vous connecter à tel ou tel fournisseur. Je n'ai pas bien compris: est- ce que c'était un dispositif d'installation avec obligation de prendre un abonnement ensuite, ou bien?
Free se lancera en tant que "accès gratuit à internet sans pub" (et Mageos aussi).
Heu, ça marchait comment? Quand je m'y suis abonnée (entre 2005 et 2007), c'était en tout cas payant et je l'avais surnommé "Crétin.fr" comme dans leur pub, car le simple fait de faire une recherche d'images faisait sauter la connexion!
Il fallait alors faire redémarrer l'ordinateur pour faire repartir ladite connexion; c'était long, et j'en avais pris l’habitude: "Bon, je fais la vaisselle pendant la prochaine coupure". Du coup je faisais plutôt les recherches sur Yahoo, moins fourni, que sur Google!
Avant d'en arriver là, internet au milieu des 90's c'était surtout lire son "courrier" sur écran (je l'avais lu dans Okapi, en 1995). Oui? Mais pour écrire à qui? En fait, l'internet primitif servait surtout à communiquer, avec des inconnus, et de préférence jusqu'à l'autre bout de la terre.
Son prix et sa lenteur expliquaient cela. Car, jusqu'en 2006 environ, l'accès se faisait par ligne commutée ou "bas débit". Concrètement, l'ordinateur n'était pas relié en permanence; il fallait se connecter quand on en avait besoin. Ladite connexion se faisait toujours avec un inoubliable bruit tonitruant.
Après il fallait faire vite: jusqu'à la déconnexion, chaque minute était comptée comme avec le minitel. Cela en outre occupait la ligne téléphonique, en sorte qu'avoir une ligne secondaire pouvait encore être utile. Avoir des portables aussi: tomber sur la ligne occupée, à l'époque, était fréquent; généralement on n'insistait pas et on joignait le correspondant sur son portable.
Wanadoo proposait une ligne secondaire, via une pub où un père occupe la ligne de téléphone parce qu'il "chatte avec des filles" selon sa femme... |
Pas de haut débit et pas de wifi non plus, (démocratisé au milieu des années 2000), en sorte que souvent un seul terminal était connecté et qu'on ne pouvait utiliser internet que chez soi, au travail ou à l'école. C'est d'ailleurs au lycée que j'ai consulté mes premiers sites ( à mes risques et périls, il était interdit d'y aller autrement que dans un but strictement pédagogique).
Ajoutez-y l'impératif de posséder un ordinateur, pas toujours évident , et tout le monde n'était pas équipé (15% des foyers français en 1995). En ce temps-là, on estimait mauvais pour les yeux de passer plus d'une heure devant un écran d’ailleurs...
Autant dire qu'internet ne servait qu'avec parcimonie, d'ailleurs pour pallier à son absence on vendra longtemps les ordinateurs avec une collection de CD-roms.
.
Quelques classiques, parmi eux, étaient Adibou (pour les petits) ou l'encyclopédie Encarta, plus tard ringardisée par Wikipédia.
Il fallait être rapide jusqu'à la déconnexion, le problème, c'est que ça n'allait vraiment pas vite.
Les pages s'affichaient petit à petit, tout comme les images du reste, et un gag lié aux débuts du net consiste à montrer une image dont le haut donne à espérer, mais l'affichage complet prouve que non.
Un pub de la fin des années 1990 montrait une jeune femme pressée de rejoindre son flirt internet, sans avoir vu au complet sa photo à cause de la lenteur du chargement. Cela dit de beaux yeux bleus semblent prometteurs...Après son départ, les yeux se révèlent appartenir à un poster de Paul Newman, punaisé au dessus d'un canapé où est avachi le véritable futur rendez-vous, un beauf qui rote (magie du gif animé). Il va sans dire que la pub était pour un fournisseur plus rapide.
La première image jamais vue sur internet remonte à 1992: le groupe de musique de chercheuses du CERN. |
D'où le fait de privilégier les chats type AOL messenger ou MSN (on s'en va quand ça commence à faire trop longtemps) et les courriers (on relève quand on le peut).
Pour nous montrer le potentiel "Vous pouvez parler à n'importe qui", les pubs les plus anciennes de Wanadoo exhibaient des conversations random entre une écrivaine et ses lecteurs ou un musicien amateur et ceux qui peuvent lui fournir la partition dont il a besoin, sur un toit, style: c'est comme s'ils étaient à côté de vous.
Un épisode de Futurama, Le Mariage de Leela, a été diffusé pour la première fois en 2000, et malgré qu'il soit censé se dérouler en 3000, reflète exactement le mode de communication d'alors (seule modernisation, c'est en réalité virtuelle). Sinon, le professeur Farnsworth annonce qu'il a réussi à lancer internet (ça va plus vite aujourd'hui), et les personnages se font littéralement attaquer par des bandeaux de pubs, car avant Adblock les pages disparaissaient presque en dessous.
Ils se servent surtout d'internet pour fréquenter des chats de sexe (leur destination première, c'est pourquoi dans Futurama internet ressemble à un quartier louche).
être sur internet...justement).
En outre, il n'y a quasi pas de femme dans ledit chat, puisqu'aux débuts d'internet l'acronyme G.I.R.L signifiait Guy In Real Life.
On assumait que les femmes n'utilisaient jamais internet, et que si apparemment il en avait une sur un chat, c'était un homme qui mentait. Pour éviter le harcèlement, on conseillait aux premières utilisatrices d'user d'un pseudonyme neutre y compris sur les forums les plus innocents.
Dans le film Vous avez un message (1998), on modernise l'histoire d'origine en faisant communiquer le couple de l'histoire non plus par lettres mais par mails. Cela reste cependant étrange à regarder aujourd'hui, où de tels échanges auraient lieu sur Tinder.
Vous n'aimeriez probablement pas taper la discute avec quelqu'un qui vit à New York ou Tokyo si vous le connaissez pas, aujourd'hui, mais avant il n'y avait guère le choix, c'était en fonction du nombre de gens qui avaient pu se connecter en cet instant.
Ça explique qu'en 1996 dans Scream, Sidney laisse un appel au secours sur un chat au hasard, et que le tueur ne se doute de rien, n'ayant sans doute jamais eu l'occasion d'utiliser internet alors.
En l'absence de Facebook, lancé en 2004, (mais aussi de twitter, instagram, skype, what's up, etc) les communications passaient quasi toutes par les mails.
D'où l'indispensabilité des "nimails" comme ils disaient dans la pub.
C'est par là que transitaient les contenus viraux type petite vidéo ou animation rigolote (et oui, à l'époque on pouvait écrire à un ami rien que pour partager ça, d'où la chanson virale "Arrête de lire tes mails au boulot" alors qu'aujourd'hui c'est ce qu'on est censé faire, au boulot).
Pour télécharger une vidéo au complet, il fallait s'armer de patience, expliquant que Youtube et Dailymotion n'existeront pas avant 2005.
Circulaient des choses comme l'animation Dancing Baby (je l'avais vue à la télévision pour ma part, dans la chronique de Philipe Vandel). C'est tout? Oui, car littéralement un rien amusait les utilisateurs vu la nouveauté.
On pouvait voir ces choses dans ses mails, mais aussi directement sur certaines pages. Vous trouvez puéril, dans l'épisode Le Site inter (pas) net d'Homer (2000) des Simpsons, de la part de celui-ci de lancer une page où il n'y a en tout et pour tout que des animations? Ce n'était pas si rare. Des sites se réduisaient à une seule page, avec éventuellement un son d'arrière plan.
Et des gifs animés, comme on disait. Des bananes dansantes se rendront célèbres soit sur Peanut butter jelly time soit sur Agadou, et des petits hamsters sur une version accélérée de la chanson d'ouverture du Robin des Bois de Disney.
Oui, on allait voir des sites rien que pour ça. Les contenus s'étofferont, notamment avec les lancement des sites de fans (ils précéderont souvent les officiels) mais ils vous auraient sûrement déroutés: peu d'images, presque pas de vidéos ou de son, un lettrage criard (souvent bleu pétard) et énorme...
sans parler du fait qu'on tombait régulièrement sur quelque chose d’impensable actuellement : "page en construction", et le logo qui va avec.
Ce n'était pas rare de lancer un site alors qu'on ne l'avait pas tout à fait fini, mais l'encodage prenait du temps. Oui, oui, vous étiez censés taper du code à la main.
Je l'ai fait d'ailleurs pour une simulation de site pour mon évaluation de fin d'études, faute d'avoir jamais réussi à utiliser Dreamweaver qui servait à "découper" une page créé par exemple sous photoshop et à la recomposer morceau par morceau pour l'envoyer (avec moi, les morceaux reprenaient leur place initiale!).
Pour expédier tout ceci, je n'ai jamais réussi à user de Filezilla (non plus) qui envoyait toujours un message d'erreur. Disons que les sites " prêts à envoyer" comme emonsite ou wix ont beaucoup facilité les choses.
Et les blogs! La première fois que j'en ai entendu parler au début des années 2000, je disais "Skyblog" pensant que c'était le terme exact.
La plateforme de la chaîne de radio Skyrock (2002-2007) était alors la plus populaire, et faute de trouver des choses intéressantes à dire, beaucoup d'ados (c'étaient surtout eux les utilisateurs) s'en servaient pour parler d'eux comme dans un journal intime classique, pas moins.
Ils agrémentaient souvent lesdits posts de gifs "Blingee" qui servent à fabriquer des images dégoulinantes de paillettes. Aujourd'hui elles ne servent qu'avec un certain second degré, mais au début des années 2000 on pouvait les afficher avec le plus grand sérieux.
Pas sûre que Skyrock.com serve autant aujourd'hui et on peut en dire autant de Myspace. Avant Facebook, c'était le premier site à espace personnel, mais il s'est vite fait descendre par le second.
Au royaume des disparus (ou disparus de l'avant -scène) nous pourrions en citer quelques uns parmi Liberty surf ou Club Internet que j'ai connu par les pubs télé. Je me rends compte que j'évoque souvent celles-ci, mais parce que pendant longtemps on n'a vu d'internet que les pubs, et Club Internet, notamment, en parlait vraiment comme de quelque chose de révolutionnaire...ce qui s'est révélé vrai, mais sur le moyen terme. En 2000-2001, c'était moins sûr et on pouvait rester dubitatif, devant la pub de 1998, devant des fascistes brûlant des écrans, car internet est "l'outil idéal de la liberté et de la culture".
En 2001 dans une autre pub, Club internet affirmait que le web rend "le monde plus humain".
Et puis, ces révolutionnaires et artisans de paix dans une pub Liberty surf (Lénine, Zapata, Robespierre, Che Guevara, Gandhi) qui depuis l'au-delà épient la terre et voient dans internet la nouvelle grande révolution, un total libre échange, où "tous les hommes sont libres de s'exprimer, sans censure". C'eut réellement été révolutionnaire si c'était resté gratuit, mais ça...
C'était visionnaire dans la mesure où de tels échanges se sont effectivement produits par la suite. Mais, vous le savez, nos révolutionnaires n'avaient pas anticipé l'arrivée des trolls. "Sans censure" se traduit surtout aujourd’hui par "sans tabou". Inversement, depuis une dictature comme la Corée du Nord, la Chine ou la Birmanie, essayez donc de vous connecter sur votre boîte mail, ou Google (spoiler alert: ça ne marchera pas. Censure, toujours, Zapata !) Et les fascistes, plutôt que de brûler les écrans, s'en servent comme d'une tribune depuis qu'ils sont faciles d'accès.
Internet ne pouvait rester éternellement ce monde des Bisounours, et ce scepticisme se voyait dans la pub du fournisseur Frisbee (2001). On dirait une parodie des précédentes pubs, avec ses consommateurs-moutons et son commentaire "It is a world of...(paix, échange, prospérité...)"
Les fournisseurs ont beaucoup changé-et les sites aussi. Les débuts de youtube, c'étaient des amateurs jouant ou chantant un morceau, et plein de courtes vidéos avec un écureuil dramatique, un chat qui joue du clavier ou un enfant allemand qui fracasse son ordinateur.
Oui, un rien amusait. Mais pour moi c'était surtout un lieu plein d'AMV, ou "Anime Music Video". Autrement dit des clips amateurs, avec au début essentiellement des images d'anime (d'où le titre) sur une chanson populaire. Par exemple, Le bossu de Notre Dame de Disney se mariait bien avec les chansons de la comédie musicale de Luc Plamandon...
Jusqu'au débarquement de la loi du copyright et ses strikes systématiques. C'est pourquoi j'ai fini par déménager toutes mes AMV sur Vimeo et Dailymotion. Depuis, Youtube c'est plutôt des émissions amateurs (ou pas), des tops 10 et des tutos maintenant.
Ou des films bouts par bouts, jusqu'au prochain strike. A ce propos: vous pensiez que le piratage était né avec le streaming, torrent 411 et The pirate bay?
Mais que vous êtes naïfs. |
Je me rappelle d'un reportage télé, (fin des années 1990) à propos d'internet bas débit auquel je n'avais pas encore accès, et d'un pirate français, surnommé Maxime. Ce dernier trouvait par le net (sans précautions) des clients pour ses CD et DVD gravés, (évoqués dans l'article précédent) qu'il envoyait par la poste contre des chèques aussi expédiés par courrier. Imprudent bien sûr: le reportage montrait sa garde à vue puis sa convocation proche au tribunal. Les pirates apprendront à se délocaliser.
Mais encore? Plus pratique que les supports physiques, le peer to peer. Napster sera l'un des premiers sites de piratage (2000) célèbres pour avoir utilisé ce mode de partage de fichiers musicaux d'un utilisateur à l'autre (et qui nouveauté, peuvent être très éloignés les uns des autres).
Un épisode de Futurama , Je sors avec un robot, évoque cette histoire avec des célébrités téléchargées contre leur gré sur des robots vierges, qui deviennent leur copie.
Napster, dont les créateurs ne se cachent pas, est vite fermé (aujourd'hui c'est un service d'abonnement) mais le pli est pris. D'autres peer to peer comme GNU ou Emule servent à échanger non seulement des fichiers musicaux, mais aussi des films (pour ces derniers, le streaming n'existe pas encore) . Vu la lenteur du bas débit, en télécharger ne serait-ce qu'un pouvait prendre des heures, et laisser tourner son ordinateur toute la nuit n'était pas rare chez les pirates.
A l'arrivée du streaming en 2005, on trouve principalement Megaupload. Il présentait la particularité de s'arrêter au bout de 72 minutes-pour voir la suite du film il fallait théoriquement attendre 24 heures. Mais des astuces se répondront très tôt, comme débrancher et rebrancher la box et changer ainsi d'adresse IP, permettant de visionner la suite aussitôt.
A la sortie de Dragon Ball Evolution en 2009, on m'avait conseillé de visionner ce film en piratage pour gêner sa honteuse carrière. J'ai donc étrenné Megaupload et n'ai pas vu la fin, ne sachant alors pas contourner le souci des 72 minutes.
Megaupload est fermé en 2012, et après environ une année de flottement et de recours au téléchargement, des dizaines de plate-formes semblables voient finalement le jour. En fermer une ne changera donc cette fois plus grand-chose.
Aujourd'hui, on a plus recours à elles qu'au peer to peer. La vidéo à la demande, et les fournisseurs en ligne permettent aujourd'hui un accès direct et légal à certains catalogues vidéos-le streaming se rendant surtout utile pour retrouver des films et séries rares; ou juste sortis en salle, c'est selon. Ajoutez-y les services replay, permettant de voir quand on veut une émission, et sans doute comme moi, n'avez- vous plus de télévision depuis trois ans.
La musique, le cinéma, c'est bien, mais la littérature? Il y a environ dix ans j'avais lu un exemplaire de Science et vie Junior consacré à internet, une page était au sujet des "pièges" à y éviter. L'un était "croire que l'on peut tout trouver sur internet" et à l'époque je pense qu'effectivement vous auriez eu des difficultés pour cela.
Ils donnaient l'exemple concret d'un collégienne intéressée par Le journal d'Anne Frank après en avoir entendu parler en classe. Pouvait-elle trouver (gratuitement, on suppute) le texte sur internet? "En deux minutes" lui répond- on. Elle passe une heure à chercher (sans moteur de recherche, je crois) pour des pruneaux d'Agen, ne tombant que sur des fiches techniques du livre ou des résumés des adaptations, et à l'époque vous n'auriez effectivement trouvé que ça. Il aurait fallu en fait chercher l'ouvrage à la bibliothèque, concluait-on, et en effet avec un titre si connu c'était alors la chose la plus efficace à faire.
Mais aujourd'hui? La curiosité m'a récemment prise de voir en combien de temps on trouverait le texte. En une minute en version payante, sur Google books. Et effectivement en deux minutes en version gratuite, le temps qu'il m'a fallu pour trouver un site de téléchargement de PDF (chercher un format epub prend 44 secondes). Avec un livre moins connu ce serait sans doute plus compliqué néanmoins, mais: maintenant trouve-t-on tout sur internet?
La réponse est proche de oui avec le Dark web. A ne pas confondre avec le Deep web, qui est tout simplement toutes ces pages non référencées sur les moteurs. Sont concernés le contenu de votre boîte mail, ou lorsque vous faites une réservation SNCF , et autres espaces personnels. Bref le Deep web, vous y êtes tous allés, et souvent.
Le Dark web, ce sont ces sites non référencés parce que dangereux. Pour éviter une arrestation immédiate, le consommateur doit y accéder par un routeur extérieur T.O.R et son routage dit "en oignon", on ne peut donc pas s 'y retrouver par hasard. Là- bas s'y vendent des armes, des drogues, des snuff movies, les services de tueurs à gages, des médicaments sans prescription...
Disons que tout ceci n'existait évidemment pas au début, mais ces choses illégales se sont vite rendues intraçables.
Vous auriez peut-être eu du mal à reconnaître ebay, à l'époque. La plate forme passait uniquement par enchères, et je les perdais toujours. Disons que je m'en sers bien plus depuis que l'achat direct est possible.
Les pages jaunes vont vite migrer sur internet, aussi. D'où cette plaisanterie qui a surtout circulé au début du haut débit:
"En début d'année, dans un commissariat, un policier demande au commissaire où sont les annuaires, et ce dernier répond qu'il n' y en a plus puisqu'on peut user des ordinateurs à présent. Quand le policier proteste qu'il lui faut un annuaire, le commissaire répond sèchement d'utiliser les ordinateurs et d'arrêter de faire des histoires. Quelques minutes plus tard, il entend d'horribles cris dans la salle des interrogatoires musclés. Le commissaire va voir, et trouve un suspect qui se tient la tête, avec une grosse bosse au front, et le policier, qui tient un écran cathodique. Qu'est- ce qu'il fabrique? Et bien, d'habitude, ce policier donne des coups d'annuaire pour faire avouer-ça ne laisse pas de traces-mais comme là on lui avait dit "Utilisez l'ordinateur..."
Il existe une variante, avec une secrétaire qui grimpe sur un écran qu'elle explose avec ses talons, faute de pouvoir se jucher sur une pile d'annuaires pour atteindre le haut d'une armoire. Mais ça revient au même: la disparition progressive du support papier, qu'on le veuille ou non.
Facebook n'a été inventé qu'en 2004. Donc: Où parlait-on avant? Caramail, puis MSN messenger (fermé en 2015), par exemple ont précédé Skype et la messagerie Facebook pour rester en contact. Et les pages spécialisées et autres clubs? Et bien, on en passait plutôt par les forums pour discuter entre passionnés. Mon premier forum fut celui de Disney Central Plaza en 2006, et j'y suis toujours. C'est aussi le seul où j'intervienne encore, alors qu'au début des années 2010 j'ai été inscrite jusqu'à une dizaine de forums. Les pages Facebook, de fait, leur auront donné un bon coup de vieux.
Les magazines coquins en auront subi un aussi, car le fait de trouver du porno avec une déconcertante facilité a viré la nudité des programmes plus classiques. Au point que Playboy, depuis 2016, est une publication tout public, sans playmates.
Attention toutefois, si votre petit frère ne peut plus tomber par hasard sur une collection de cassettes vidéos coquines, le contrôle parental d'internet est indispensable, comme on l'a découvert assez vite.
En 1999 déjà une pub AOL vous mettait en garde avec une fillette demandant si "Papa aussi il porte des slips en cuir." Toujours aux premiers temps d'internet, je me rappelle d'un site de détournements porno de personnages de cartoon sur lequel on était tombés par hasard (parfaitement, c'était possible). Plus étrange encore, l'ordinateur avait enregistré tous les "thumbs" (miniature des photos) du site en question sans que je comprenne comment. S'en sont suivis des semaines de traque et d’effaçage avec le mot clé "thumb" pour les faire disparaître de l'ordinateur familial.
Aujourd'hui encore, gare aux galeries d'art en ligne comme Deviantart: les pervers y abondent et si la pornographie proprement dite y est théoriquement interdite, la nudité sous prétexte anatomique y permise. Sans oublier les fantasmes étranges de personnages célèbres rendus enceintes, ou obèses, etc. Bref là aussi n'oubliez pas le filtre "mature."
Le bas débit, je l'ai dit, ne permettait qu'une consommation très limitée d'internet, tout comme le tarif prohibitif des premiers abonnements. Au début de mes études, je devais encore me rendre régulièrement au cyber café, et vu le prix il n'était pas possible de rester longtemps. Les cyber cafés qui aujourd'hui sont surtout utiles aux étrangers (touristes ou fraîchement émigrés) et aux joueurs de LAN parties, ou encore des joueurs désireux de jouer sans restriction parentales.
En avril 2002, après le premier tour des présidentielles, la soirée spéciale des Guignols de l'info pouvait encore se permettre de présenter un technicien Canal grognant "Ça charge!" à chaque fois qu'on lui demandait les réactions des internautes. Qui depuis, à chaque élection, ne se font plus guère attendre.
En 2001, l'attentat du World Trade Center était encore un événement télévisuel pour la planète. Mais depuis, de tels drames incitent plutôt à glaner des infos un peu partout sur la toile, y compris par écrit.
Bien plus que l'arrivée d'internet, on peut le dire aujourd'hui, c'est l'ADSL qui devait constituer une véritable révolution.
Au début, encore une fois, je ne comprenais pas bien les pubs, axées sur la vitesse (Cégétel notamment, fusionné avec SFR depuis).
Je ne saisissais pas, pensant que c'étaient les données qui transitaient plus vite et plus nombreuses; et bien sinon, quoi? Et bien, l'affichage s'en est trouvé plus rapide. Les vidéos ne mettaient plus une plombe à charger ou télécharger, le streaming est apparu...Il fallut attendre jusqu'à cinq ans pour que l'ADSL se répande dans certains lieux reculés, mais aujourd'hui il est général.
Ajoutez- y l'heureuse coïncidence du développement de la téléphonie mobile et des smartphones en même temps, et j'admets qu'on ne réalise le plein potentiel d'internet que lorsque'il est consommable n'importe quand, sans restriction, et au fond de votre poche.
Comme moi, vous avez dû prendre l'habitude de sortir google map sur le portable en cas d'adresse difficile à trouver, ou de consulter Wikipédia dès qu'un doute surgit dans une conversation avec vos amis -sur la date de naissance ou de mort d'une célébrité, par exemple.
Ou encore de chercher sur Google les adresses de restaurants à proximité, de vérifier la réputation de l'hôtel où vous comptez aller sur Tripadvisor, de ziueuter les lieux qui vous intéressent sur Google earth (même s'ils se débrouillés pour continuer à cacher la zone 51).
Pratique aussi, de ne plus rien rater grâce au replay et de ne plus se disputer grâce à la multiplication des écrans individuels. Ou de s'alléger considérablement, sans plus besoin de cassettes, d'encyclopédies, de livres de cuisine, d'annuaires. Trouver des tutos pour tout et n'importe quoi, c'est sûr, ça change la vie aussi.
Le haut débit rime aussi avec les mondes persistants (rassemblant de multiples joueurs et ne s'arrêtant jamais) dans les jeux vidéos, et la nécessité de savoir décrocher (pour des petits trucs comme travailler, dormir, passer à table...) pour les pratiquants. Sinon? En 2005, un jeune coréen a été retrouvé mort dans un cyber café (ouvert 24 h/24 h en Corée du sud), après plus de 50 heures à jouer sans dormir, manger ou même boire ce qui l'a tué d'épuisement.
La prudence s'impose...et pas juste sur ce point. Pendant les 10 premières années du haut débit, j'avais vu le développement d'internet comme quelque chose d'uniquement positif, et consommait sans jamais me poser de questions.
Mais depuis j'ai connu quelques dramas, uniquement dus à la plate forme, et donc je m'interroge...Récemment, pour avoir l'esprit tranquille, il m'est arrivée de me déconnecter pendant plusieurs jours.
Bien sûr que c'est formidable de pouvoir envoyer en temps réel des messages à ses célébrités préférées, et surtout de pouvoir lire ce qu'ils ont à dire sur Twitter. Hélas, il n'y a pas que les gens intelligents qui s'y expriment, et pas seulement sur Twitter.
En fait, il suffit de lire certains commentaires pour avoir cette impression...
Non pas que le monde soit devenu plus stupide bien sûr, mais ceux qui l'étaient déjà sont plus audibles. Et surtout, c'est plutôt eux qui s'expriment, selon le principe de la minorité bruyante.
J'ai parfois été quelque peu déprimée et maintenant, internet est définitivement entré dans la phase: ne pas lire tout ce qui se passe, pour ne pas devenir fou...(voire complotiste!) L'outil idéal de la liberté et de la culture, oui, mais aussi de ceux qui ont brûlé les livres.
Bref, internet c'est une invention géniale, mais s'il est maintenant accessible sans restrictions, il faut se poser soi-même lesdites restrictions, visant à ce que ça reste une expérience agréable.
Que tout cela nous réserve-t-il pour les prochaines années? L'expérience virtuelle à la Futurama ne me déplairait pas (espérons que ce sera avant l'an 3000).
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire