-Le lolita
-Le steampunk
-Le disneybound
-Le Strega
-Le Vintage
Quatrième mode alternative, le dolly, mori et natural kei.
Je les évoque en même temps car elles sont proches sans pour autant être identiques. Le mot "kei" signifie mode au Japon et les trois sont originaires de là-bas.
-Le natural kei
C'est la plus ancienne des trois, apparue dans les années 1970. Avec le succès de la série La petite maison dans la prairie, et des meisaku (dessins animés qui adaptaient des grands classiques de la littérature enfantine du XIXème siècle comme Anne aux pignons verts et Princesse Sarah), des japonaises commencent à s'habiller façon pionnières américaines, avec de longues robes à fleurs; ça ne jurait pas trop avec la mode hippie. Les marques de l'époque, Laura Ashley, Gunne Sax, et Young Edwardian s'inspiraient aussi de la période XIXème et avaient un look "fleuri".
Le style a un peu changé depuis (on prétend la version d'origine, ou style "prairie", disparue aujourd'hui). L'idée, c'est de ressembler à une femme vivant dans un pré, en lisière de la forêt, ou dans un cottage d'un petit village: elle a peu de moyens mais accès à certains falbalas du moins.
Il s'agit de porter des jupes ou des robes qui, quand elles sont à motif, sont le plus souvent à fleurs comme le liberty (ou à carreaux comme le vichy).
Elles sont de préférences longues, et à volants ou dentelles (en bas de la jupe, ou au col), associées à des chemisiers d'aspect vintage et à froufrous, fréquemment à col claudine. Le tout dans des matières naturelles (pas de nylon), et rustiques (pas de soie, par exemple).
Selon les saisons, on y associera des gilets en laine, longs manteaux, des châles, des écharpes ou même des tabliers, très façon petite fille de Sarah Kay.
Et d'ailleurs, le style fait parfois fillette du temps jadis; comme par exemple avec le port de robes à smocks. La différence avec le lolita, est qu'il n'y a pas de jupon.
Tout ceci est dans des tons clairs, mais variés (rose, bleu, vert, jaune, violet, etc). Pas de fluo, ou de couleurs trop prononcées.
Les chaussures peuvent être des rangers montantes, des richelieu ou des bottes à lacets (hiver), de préférence marron ou beiges. Ou bien des babies et des ballerines (l'été) dans des tons clairs, pourquoi pas à fleurs. Voire des sabots, dans certains cas! De façon générale c'est sans talons, et pas de baskets bien sûr.
Les collants et chaussettes sont à fleurs ou en dentelle (été) ou en laine épaisse (hiver).
La coiffure de prédilection sont les nattes, ou bien les cheveux sont flottants (encore mieux s'ils sont frisés), le tout est attaché avec des rubans.
On peut porter avec soit des chapeaux de paille, soit des chapeaux à capote (dits aussi des cabriolets).
Plus simplement, on peut aussi se mettre un fichu.
Le panier ou cabas en paille, lui, est populaire en guise de sac à main. Il s'orne parfois de dentelles, fleurs ou papillon...
Le maquillage et les bijoux sont discrets. Ceux-ci sont bucoliques (en forme de fleur ou de faon par exemple) et plutôt dorés qu'argentés.
-Le mori kei
Mori signifie forêt. Donc, littéralement, la fille mori est "la femme de la forêt". D'où ce nom poétique parfois utilisé pour désigner les adeptes en occident: les dryades, du nom des nymphes des arbres de la mythologie.
Le genre est plus récent: on date son apparition à 2007. On attribue l'invention à une utilisatrice de la communauté en ligne "Mixi", connue sous le nom de Choco. Cette année- là, elle lance sa liste des 62 règles du mori kei (même si le style est très souple question règles).
Les sources d'inspiration originelles seraient les personnages de Hagumi Hanamoto dans le manga Honey and Clover (2000-2006) et Shizuru Satonaka dans le film Heavenly forest (2006).
Ce style désigne "la fille de la forêt ", non celle qui vit à la lisière mais qui est dedans, comme si elle était un esprit des bois.
Donc le genre est plus évanescent, plus pâle aussi :les adeptes portent du blanc, du beige, parfois du brun , du vert ou du gris clair : les couleurs de la forêt, qui permettent de s' y fondre.
En outre elles portent toujours plusieurs couches ou superpositions de vêtements. Une veste, un poncho ou un châle (par exemple en laine crochetée) sur un pull, et une jupe courte sur une longue robe ou jupe. Mais pas un pull sur un pull, par exemple...
En général tout ceci est uni, et de forme "A" c'est à dire que la taille n'est pas marquée (le style est également sans jupon). L'idée c'est de "flotter" dans les vêtements. Il ne faut pas hésiter à les avoir trop grands- surtout pas de pull ou de jupe moulants. Idéalement aussi, tout ceci est long à commencer par la jupe. Et de préférence vintage.
Le tout blanc, et tout en laine, est populaire. On l'appelle aussi Street mori car il a débuté à Harajuku (c'est le style originel).
Avec des petits motifs et des couleurs plus variées, cela devient le style bohème. On l'appelle aussi Magazine mori car il est apparu au départ dans des photos de magazines comme Mori girl lesson, Fudge, et Spoon.
Avec des couleurs plus soutenues et de grand motifs, c'est le mori bold ou "tribal".
On peut y ajouter de la fausse fourrure, toujours dans des tons de blanc. En guise de chapeau, il n'est pas rare de porter des bonnets de laine ou des cache- oreilles.
Les coiffures sont sensiblement les mêmes qu'en natural, et les chaussures aussi (mais plutôt dans des tons clairs). Pareil pour les sacs (toujours en paille) et de préférence avec des ornements vintage.
Le port de bijoux ne se prête pas vraiment au style, mais néanmoins quand il y en a, ils sont de préférence dorés ou cuivrés. Les mini -loupes, les flacons emplis de végétaux, les cristaux et les clés sont des pendentifs populaires.
En outre, les accessoires en forme de faune ou de flore forestière sont très appréciés comme les mini-bois de cerf ou les champignons tue-mouches. On les trouve notamment sur les serre-têtes. Le maquillage est lui très discret.
Entre la fourrure, la laine, et les épaisseurs vous pensez probablement que ce style se prête plus à la saison froide...Et vous avez raison, difficile d'être mori au printemps ou en été. Toutefois, le style "modern mori" y convient davantage, il consiste comme le nom l'indique à moderniser le look avec des jupes courtes. Si en plus on porte du coton, de la dentelle ou du lin, ça passe pour la saison chaude.On dit aussi "simplistic" , "pratical" ou "casual", plus court, c'est utile pour vraiment faire des randonnées en forêt.
Certaines modernisent le style avec des pantalons, ou des tee shirts qui se fondent bien dans l'
ensemble.
Croisé avec le gothique, il existe un sous-style, le dark mori (ou" black forest mori", de la forêt noire).
Il est en fait identique, mais dans des tons de noir ou gris foncé.
Certains éléments faisant sorcière des bois comme un large chapeau en feutre noir ou des bijoux un peu sinistres (des vieux médaillons, ou en forme de crâne de corbeau par exemple) peuvent être ajoutés.
On peut aussi mêler le mori avec le cult party ou le dolly kei, voir ci-dessous. Dans le premier cas on garde les peignoirs translucides et dans le second les motifs tapisserie. Mais les deux gardent les nombreuses couches du mori.
Il existe également un croisement avec le lolita:
Les teintes sont les mêmes, et les superpositions aussi, mais avec la silhouette caractéristique du lolita (avec un jupon).
Comme le lolita d'ailleurs, il y aurait une variante OTT (over the top). Certaines mori ont été photographiées avec des bois de cerf et des oreilles elfiques.
On dénombre aussi le romantic (en blanc, mais avec parfois du synthétique)
ou le shabby chic. A l’origine le terme désigne un type de décor inventé dans les années 1980. Vintage, usé même, mais romantique, de teintes claires et à motifs de roses. Le décor Laura Ashley, en gros.
Appliqué au mori, ça consiste à porter du rose et du bleu pastel, des motifs de fleurs, et encore plus de dentelle.
Enfin on appelle "Yama girl" (yama voulant dire montagne) la mori qui ajoute des éléments faisant plus montagnarde à ses habits, notamment des chaussures de marche, un sac de randonnée, un motif d’edelweiss, des motifs caractéristiques comme l'écossais, et parfois des teintes plus soutenues.
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Les Hama (hama=plage) sont la variante marine. Elles ont parfois des habits plus légers (pour le bord de mer en été) et incluent du bleu foncé et des rayures, des cabans, et des chapeaux de paille.
Pas de règles, de silhouette caractéristique, un aspect dissymétrique , des vêtements peu onéreux qu'on trouve partout, pas de marque, pas de jupon, des adeptes solitaires (donc pas de rassemblement) ...je me demande (même si ce n'est qu'une hypothèse de ma part) si le mori ne doit pas son succès, en réaction au lolita où c'est généralement l'inverse qui prévaut?
-Le dolly kei
C'est le troisième style, qui, lui, se veut la variante urbaine.
Il apparaît en 2009, en même temps que la friperie tokyoïte Grimoire (ouverte en juin 2008).
Les premières dollys étaient des clientes de cette boutique au style particulier, d'où le terme alternatif de Grimoire Kei. Comme son nom l'indique, il s'inspire des vieilles poupées, et aussi des contes de Grimm, du style des paysans slaves, et des bohémiens.
Les couleurs sont plus prononcées et variées que dans le mori, mais plus sombres que dans le natural. Le style consiste, soit à paraître porter sur le dos ce qu'on aurait trouvé après une virée chez l’antiquaire, soit à sembler en tenue traditionnelle d'Europe de l'est. Comme toujours les tissus sont naturels, les habits longs, et les origines des vêtements, anciennes. Le velours et le satin s'ajoutent aux types de tissus déjà utilisés dans les deux autres modes.
Porter des accessoires trouvés dans le grenier se prête parfaitement au style. Par exemple un renard de grand-mère, ou carrément une vieille étole de prêtre en guise d'écharpe (le fait que le christianisme n'est pas la principale religion du Japon aide...). Plus étrange encore, certaines ont employé des cordelettes de rideau à pompon pour ceinture (et ça fonctionne!).
On hésite pas à porter plusieurs couleurs contrastées ensemble, mais pour éviter un effet clown il faut qu'elles soient sombres (jaune moutarde, bleu myrtille, bordeaux, prune, épinard, marron...). Le tout se conjugue avec de vieilles dentelles, des fourrures, des châles, des mitaines résilles, des motifs tels que le liberty ou le tissu provençal, des broderies, des bijoux style vieux médaillon, des croix, des camées, longs colliers de perles, fleurs en tissu...Parfois même, ils sont macabres (en forme de crânes d'animaux).
Les sacs sont variés: les sacs en tapisserie à la Mary Poppins, les bourses en velours, les sacs à main à fermoir à clips métalliques...
Les chaussures peuvent être là encore des bottines à lacets, des richelieu, des babies, mais les modèles à talons se portent aussi.
Elles peuvent être dans les tons marrons, mais aussi bordeaux, jaunes, vertes...si elles font un joli contraste avec les collants. Ceux-ci sont de préférence à motifs comme des fleurs, des papillons, etc.
Les coiffures incluent des chignons, et le maquillage est plus appuyé. Pour ces raisons, il s'agit du plus adulte des trois styles.
Les chapeaux sont assez divers aussi: les chapeaux de paille, mais aussi les toques en fourrure, les bérets, les chapeaux en feutre, ou à plumes, les cabriolets, ou les couronnes de fleurs (parfois hérissées de mini-bois de cerfs! ). Avec tout ça, on s'en doute, le style se prête là encore davantage à l'hiver.
Plutôt séduisant, non, ce style "sorti du grenier"? Pourtant, il serait déjà mort! Depuis 2012, le dolly se serait beaucoup raréfié, et son existence fut donc courte. Pourquoi? Aucune idée, d'autant qu'il s'agit d'un style plutôt original visuellement . Mais se procurer les pièces était-il trop difficile?
A propos de magasins: il est déconseillé aux occidentales intéressées par le dolly de s’approvisionner via le site de Grimoire. En effet, la boutique revend des fripes venues d'Amérique et d'Europe. Autrement dit: on a déjà tout ça sous la main. Existe-t-il des marques ou boutiques spécialisées? C'est là le souci: pas vraiment, pour aucun des trois styles (un magasin mori du nom peu explicite de Wonder Rocket a existé, mais a fermé en 2017) .
On peut trouver des vêtements vendus sous cette étiquette, dans des sites plus généraux comme Etsy, Aliexpress et E-bay.
Des labels indépendants peuvent avoir ces genres-mais sans les revendiquer (certains magasins de taobao sont sur ce créneau comme Dear Li). Le label Nectarine vend des robes déstructurées, qui rappellent les couches de matières du mori. Et surtout, vous l'aurez compris: les meilleures pièces sont antiques et donc de seconde main, dans ce cas. Il s'agit d'ouvrir l’œil et d'écumer les greniers, les brocantes, les antiquaires, les friperies, les sites de dons, etc.
Le mori, en particulier, est un des rares styles qui peut être fait avec des pièces dénichées dans des magasins des plus classiques.
Vous vous demandez sûrement: ces styles peuvent-ils être aussi masculins? Bonne question...taper "mori boy" ou "natural kei boy" génère bel et bien des occurrences d'hommes vêtus tels des bergers ou des tyroliens, mais dans l'ensemble, ils portent du rustique plutôt que du natural-mori- dolly à proprement parler. La longue silhouette floue, et les superpositions, sont en effet difficiles à faire sans robes.
Mais à dire vrai: même les femmes sont rares. En occident en tout cas, ce n'est pas du tout une vision courante dans la rue. En fait, je n'ai jamais vu ces styles que sur tumblr ou instagram.
C'est peut-être normal: le mori kei était plutôt (ironiquement) un style de rue, très visible à Harajuku entre 2007 et 2013. Cette année-là, il s'efface des trottoirs de cette rue (comme beaucoup de styles alternatifs, finalement). Mais entre temps des occidentales l'ont adopté (ce sont surtout elles qui ajoutent des couleurs sombres ou des bijoux argentés, parfois). Ce sont elles qui le portent aujourd'hui, même si ces trois styles sont peu vus à l'extérieur.
Peut-être parce qu'ils sont effectivement rares, mais aussi parce qu'il s'agit de styles idéalement ruraux, portés par celles qui vivent à la campagne, ou lorsqu'elles s'y trouvent, et où on ne croisera pas beaucoup de gens donc.
Et ce ne sont pas des modes très "sociables". Pas de clubs spécialisés, de concerts, de GN, de rassemblements ou conventions pour se retrouver.
A titre d'indice, sur les photographies, les filles sont presque toujours seules. Rien de surprenant à cela: les activités des "lifestyle" sont solitaires.
Etre lifestyle, là encore, on n'y est pas obligée. Mais quand les natural et mori girls le sont: elles sont écologistes, parfois aussi végétariennes. En ville, elles aiment écumer les antiquaires, les brocanteurs, les magasins de décoration, et lire dans les cafés.
A la campagne (le milieu naturel en quelque sorte), elles prennent des photos de la nature, se promènent en forêt, font des collections (de curiosités minérales par exemple) , des herbiers, jardinent, bricolent, écrivent, cousent, peignent, lisent dans les bois. Rien qui ne requiert d'être très entourée donc.
Concernant la décoration, nombreuses sont celles qui apprécient le "cottage core" (style chaumière), très cosy avec des plaids, objets en vannerie ou porcelaine, idéalement une cheminée ou un poêle, etc:
Très oniriques (toutes ont les contes pour inspiration), ces modes sont les meilleures alliées des tempéraments introvertis.
Même si la contrepartie est, qu'une adepte sera souvent la seule de son espèce dans les parages...
Ressources:
-http://gemmei.over-blog.fr/-mode-le-japon-et-ses-styles-les-mori-girls
-Pour anglophones:
-http://dearmisskellie.blogspot.fr/2014/01/mor101-mori-kei-vs-natural-kei.html
-http://www.japanesestreets.com/reports/1078/62-rules-for-living-in-a-forest
-http://dearmisskellie.blogspot.fr/2013/10/guide-to-mori-kei-forest-girl-style.html
-http://mossmarchen.blogspot.fr/p/what-is-natural-kei-fashion.html
http://idontknowmuchbutimlearning.blogspot.com/
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